Rouge métro


La douleur est toujours là. Elle ne part pas. C'est même le contraire, elle augmente. […] Ça fait sept mois maintenant. […] Alors j'ai décidé de m'arrêter. De cesser de faire semblant…

Depuis sept mois, Cerise garde en elle la souffrance de ce qui s'est passé ce lundi 19 juin où, en sortant de chez Clara, elle a pris le métro avec sa jolie robe neuve, une robe rouge qui va si bien avec ses cheveux roux.
Sept mois qu'elle ne peut pas en parler, sept mois qu'elle ne parvient pas à revoir le film en entier. Mais le garder en elle est si douloureux qu'il lui est impossible de continuer à éluder…

Cerise a toujours eu du mal à dire les choses. Toute petite, ça lui a déjà valu une année supplémentaire de maternelle. Elle savait lire en fin de moyenne section mais elle parlait peu. La psychologue a refusé l'entrée en primaire parce qu'elle ne participait pas assez à la vie de la classe…

Heureusement, il y a eu la rencontre avec Clara en fin d'école primaire.
Clara arrivait d'Espagne. Elle faisait des fautes d'orthographe, et quand on le lui faisait remarquer, elle répondait une vacherie en espagnol. Elle avait un foutu caractère et ça nous a rapprochées. Tu m'apprends l'espagnol et je t'explique l'orthographe. Ça marche, elle a dit et on est devenues inséparables.

Si Cerise n'aime pas parler, elle aime écouter, les mots des autres, les conversations des gens, notamment dans le métro, et les interventions des sans-abri qui, chaque jour, s'adressent aux voyageurs pour gagner quelques pièces. Leurs discours amusants, maladroits, agaçants, pitoyables ou fanfarons occupent une place importante dans le livre et dans l'histoire, parce qu'un jour, le 19 juin, il y a eu Zyeux Verts…
Il était immense, avec une barbe et des cheveux hirsutes, il portait un grand sweat en coton noir avec l'inscription "Be your friend", et un jean troué aux genoux. Aux pieds, il avait des tongs délavées, trop petites d'une pointure, au moins. […] Quand il parlait tout à l'heure il avait les yeux vides, il ne regardait personne, il regardait le vide, ses yeux verts étaient éteints, j'avais à peine remarqué qu'ils étaient verts, et puis au fur et à mesure qu'il s'était avancé dans l'allée centrale avec sa boîte, son regard s'était éclairé, et à la fin il était devenu fluo son regard tellement il brillait.

Dès le début du roman, on comprend que cette rencontre est essentielle dans la douleur de Cerise mais le passé plus ancien - l'enfance, la séparation des parents, la rencontre avec Clara - est entremêlé avec le récit de cette soirée du 19 mai, si difficile à raconter pour la narratrice qui en a tant souffert.

L'auteur se donne trop de mal à créer et maintenir son suspense pour qu'on le dévoile d'un trait de plume. Alors pour connaître le nœud de l'histoire, l'importance et la nature de la relation établie entre Zyeux Verts et Cerise, une seule solution…

Une fois encore, la collection doAdo Noir aborde le sujet de la violence et de la souffrance, que le narrateur ou la narratrice en soit auteur (comme dans Je mourrai pas gibier), témoin ou victime.

Serge Cabrol 
(16/04/07)    



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Jeunesse




Claudine Galea
Rouge métro


Editions du Rouergue
Collection doAdo Noir
112 pages - 7,50 €

www.lerouergue.com


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