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		Wilfried N'SONDÉ La reine aux yeux de lune Ce roman tient du conte fantastique, du récit fondateur. L’épisode historique qui donne lieu à ce roman, se situe dans les années 1685 à 1705 dans le royaume du Kongo. L’occupant portugais y pratique la vente d’esclaves pour exploiter les terres du Brésil tout en envoyant des missionnaires prêchant la religion catholique. Des massacres ont détruit la capitale São Salvador, des guerres fratricides morcellent le pays, la famine sévit. C’est dans ce contexte que naît Kimpa Vita, dont le destin exceptionnel a été annoncé à Appolonia Mafuta, l’accoucheuse, par la Vierge Marie lors d’un rêve ; cette jeune fille sera le sauveur du peuple Bakongo. Dès sa naissance, le sort de Kimpa Vita est exceptionnel ; sa sœur jumelle meurt née, sa mère très jeune succombe à l’accouchement. Kimpa Vita est confiée à Ma Louisa, la doyenne de São Salvador. La petite fille y trouve tendresse, chaleur et fantaisie. Ma Louisa connaît des contes, des fables, des légendes qui racontent la prospérité et la puissance du peuple Bakongo du temps de son âge d’or, « celui où nous vivions sans peur d’être assassinés ou enlevés ». Quand Ma Louisa racontait la bataille de Mbwila qui eut lieu en 1665, Kimpa Vita avait le cœur serré. Les Portugais revendiquaient les terres riches en cuivre à l’ouest de leur enclave. Les princes du Kongo s’y refusèrent et une guerre devint inévitable. L’inégalité des armes provoqua une mort certaine des Bakongos. Ce récit marque Kimpa Vita pour toujours. À l’âge de 15 ans, Appolonia la recrute pour qu’elle s’initie aux pratiques ancestrales par un rite redoutable « l’épreuve de la Difficulté ». Un mois de souffrances, de faim, de soif, de feu du soleil, où elle fait l’expérience de passer de vie à trépas. Elle peut désormais « s’entretenir avec les défunts, prédire l’avenir et diriger le peuple. » Son père l’envoie alors à l’école de Luanda pour « bénéficier du savoir des ecclésiastiques européens. » Elle étudie d’abord le latin et le portugais qui lui ouvrent les portes de l’Antiquité et des récits de voyage des marins lusitaniens. Elle est baptisée Dona Béatrice et commence à étudier la Bible. L’exemple du Christ et des saints la pousse à se consacrer aux autres, cette foi chrétienne l’apaise et la vivifie. Elle s’attache particulièrement à saint Antoine de Padoue. Mais plus elle étudie la Bible, plus elle remarque les incohérences entre ses enseignements et les injustices qui avaient cours au sein de l’école ; les inégalités de traitement entre Bakongos et Portugais, le commerce des esclaves, le dénigrement de la spiritualité de son peuple. Son esprit critique progresse. Elle estime que les interprétations des textes par les prêtres sont mensongères et ont pour finalité d’asservir les étudiants et non de les émanciper et elle ose le dire en public. Cette attitude déplaît aux professeurs qui lui font payer par l’isolement et le fouet. Dona Béatrice n’a pas oublié l’initiation de Kimpa Vita. « Cette dualité m’avait façonnée, mon équilibre en dépendait. » Elle ne renie pas sa foi en Dieu mais veut combattre les « prêtres menteurs ». Elle imagine un monde où règneraient la justice et l’équité du christianisme et où son peuple aurait un sort plus enviable. Elle aimerait que « l’Afrique et l’Europe se rencontrent en une harmonieuse synthèse ». On retrouve dans ces passages, le rêve du syncrétisme religieux. L’injustice dont elle est victime et le courage dont elle fait preuve rendent Dona Béatrice très populaire auprès des élèves qui se soulèvent à leur tour pour la soutenir. Les étudiants frondeurs n’ont plus peur des prêtres. Face à ce vent de révolte, les Portugais perdent prise sur les événements. Alors que Dona Béatrice se meurt dans son cachot, saint Antoine de Padoue intervient pour la sauver et pour lui annoncer que le temps de sa mission approche : sortir les humbles de l’ignorance et de la soumission. Elle va envoyer ses disciples diffuser cette parole aux quatre coins du royaume. La suite du roman évoque la conquête de São Salvador, la ferveur des Bakongos, les efforts de Kimpa Vita pour convaincre le roi Pedro IV d’écouter la voix de Dieu et de réunifier le pays. Ce roman s’appuie sur des événements et personnages authentiques d’une histoire que nous connaissons très mal, et que certains même nient. Les missionnaires portugais s’étaient installés à Luanda, dans le territoire de la future Angola, dès 1480. Ils ont converti avec succès la population locale. Mais leur appétit grandissant et leur pratique de marchands d’esclaves vont provoquer des révoltes. L’une d’elles a bien été l’œuvre de cette jeune femme courageuse et inspirée. Nadine Dutier  (24/08/22)			Retour Sommaire Lectures Robert Laffont (Août 2023) 240 pages - 20 € Version numérique 13,99 € Wilfried N'Sondé, est né au Congo en 1969. La Reine aux yeux de lune est son huitième roman. Bio-bibliographie de Wilfried N'Sondé sur Wikipédia Découvrir sur notre site d'autres romans du même auteur : Fleur de béton Berlinoise Un océan, deux mers, trois continents Femme du ciel et des tempêtes