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Gérard GLATT
La fiction est souvent une représentation très intime du réel et le parcours d’un individu devient l’image du vécu de beaucoup d’autres. Gérard Glatt situe ses romans dans des périodes historiques troublées, complexes, où les personnages sont happés par un mouvement qui les dépasse, les emporte, modifie leur vie et leur regard sur le monde. En parallèle de ces événements liés à la grande histoire, il y a la vie à la ferme, le quotidien de ceux et celles qui continuent à faire tourner la machine, s’occuper des vaches et des champs, élever les enfants. Le bruit et la fureur d’un côté, le calme et le labeur de l’autre. Les personnages de Gérard Glatt ressemblent à des milliers d’autres mais avec des personnalités, des caractères, une détermination, qui leur sont propres et pour ce qui est de l’énergie et du tempérament, les Ferrandon sont bien pourvus, de génération en génération. Dans Retour à Belle Étoile, Jules Ferrandon a dû partir à la guerre, a connu les camps de prisonnier, s’est évadé, est revenu se cacher en Auvergne. Et pendant ce temps-là ses filles, Marguerite, née en 1937, et Renée, née en 1940, (Les sœurs Ferrandon qui donnent son titre à ce nouveau roman) grandissaient à la ferme. Leur petit frère, Paulin, un enfant adorable malgré une légère déficience mentale, a eu moins de chance et s’est noyé dans une rivière voisine. Les conditions exactes de sa noyade sont assez floues et le mystère n’en sera vraiment dévoilé qu’à la fin de ce deuxième volume. Un peu plus haut que la ferme des Ferrandon, il y a celle des Chassaigne avec, là, deux garçons, Jean et Michel. Marguerite et Jean, qui ont le même âge, auraient pu se fréquenter mais une dispute à l’école pendant la guerre les a définitivement séparés. Et puis le temps a passé, la guerre s’est terminée, Jules a repris sa place à la ferme et nous voici dans les années 50. Marguerite approche les vingt ans et choisit d’arrêter ses études pour s’occuper du domaine. Elle aime cette ferme au-delà de tout et aucune tâche ne lui fait peur. Renée, elle, continue ses études et elle a un amoureux, Jean Chassaigne. Oui, ce Jean qui a trois ans de plus qu’elle et avec qui Marguerite est fâchée depuis l’enfance. Les conditions sont réunies pour une intrigue très dense dans un décor décrit avec ferveur. Comment Jean va-t-il évoluer ? Que va devenir Renée auprès de lui ? Le commandant Fargeaux et son épouse Clotilde ne prennent-ils pas, peu à peu, la place des vrais parents ? Marguerite va-t-elle pouvoir s’approprier le domaine Ferrandon comme elle en rêve depuis toujours ? Quel est le secret de la noyade du petit Paulin ? Tout cela nous est révélé au fil des chapitres. Beaucoup d’autres personnages comme Etienne, Eugène, Baptiste, ou Rose, jouent aussi des rôles importants dans cette histoire... Côté écriture et construction, l’auteur ne choisit pas systématiquement la narration linéaire au présent ou au passé simple. Il aime surprendre son lecteur et opte parfois pour le conditionnel sur plusieurs pages ou quelques bonds dans le temps, revenant par analepse sur ce qui s’est déroulé pendant l’ellipse. Ce roman nous emporte dans un tourbillon d’émotions, de rivalités, d’amour et de haine, dans le cadre contrasté des années 50 et 60, entre les drames de la guerre d’Algérie et l’euphorie de la croissance économique, entre la vie à Paris et le décor de ces monts d’Auvergne que l’auteur nous décrit avec tant de passion. Serge Cabrol (31/01/17) |
Sommaire Lectures Presses de la Cité Terres de France (Janvier 2017) 496 pages - 21 €
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