L'escale

de Paul Hengge

avec
Philippe Clay et Philippe Laudenbach



Depuis plus de vingt ans qu'il dirige le La Bruyère, Stephan Meldegg est un homme comblé. La liste de ses récompenses affichée dans l'entrée du théâtre atteste de sa permanence dans l'art multiple de faire fonctionner une équipe, d'aller de succès en succès, de jouer la comédie, d'avoir réalisé de nombreuses mises en scène et enfin d'adapter des pièces étrangères en collaboration étroite avec la comédienne Attica Guedj

Or, depuis le jeudi 12 janvier, il récidive dans les deux derniers exercices avec L'escale du dramaturge viennois Paul Hengge. L'histoire en est simple : deux voyageurs se trouvent au même endroit et à la même heure dans l'anonymat d'un aéroport londonien. C'est à première vue parfaitement banal et sans intérêt.

Les deux hommes se parlent. Et soudain une interrogation fait son chemin car quelque chose de subtilement inquiétant est apparu dans leur conversation. Cette dernière a dépassé le cadre de l'échange opportuniste de quidams désirant bavarder pour tuer le temps, car l'un doit à des raisons parfaitement inconnues la possession d'un billet de 1 ère classe pour Hambourg, lequel lui a été remis par l'hôtesse d'une improbable agence de voyage. Et que l'autre déploie spontanément une amabilité dépassant la réserve habituelle aux gens qui se croisent pour la première fois.

Ce qui débute comme une aimable conversation d'individus disponibles comme cela peut arriver au cours d'une escale – y compris dans un salon réservé aux voyageurs de première classe – se transforme d'abord en interrogation sur les origines du billet. Cependant, un autre élément vient compliquer le mystère de la situation : le bénéficiaire de ce billet se retrouve aussi en possession d'un livre de prière rarissime, objet de ses plus anciennes recherches.

Bonheur opportun ou cadeau du ciel pour un vieux bouquiniste juif new-yorkais, c'est également un questionnement supplémentaire qui le mènera rapidement aux portes de la panique. Or il est aussi bavard qu'angoissé.

En face de lui, l'autre voyageur qui lui renvoie la balle, un Allemand, manifeste sa sympathie, converse aimablement et développe des idées où chacun des deux marque petit à petit sa différence.

Ce qui semble donc, au départ, n'être qu'un face à face courtois dérape ensuite dans l'opposition des opinions puis dans une confrontation sévère où les maux spécifiques à l'Allemagne vont réapparaître avec leur cortège de culpabilités successives et de vérités avouées.

Deux comédiens talentueux vont vous faire vivre cet échange qui procède d'une forte attente des spectateurs car la chute en est imprévisible, y compris pour les plus avertis. Philippe Laudenbach est très crédible dans ce rôle de mystérieux voyageur volubile et Philippe Clay confirme de nouveau la large palette de son talent qui est à la fois efficace et nuancé.

Au cœur de leur rhétorique, on va vivre une progression de ce suspense dont je ne vous soulignerai qu'une chose : son intensité. C'est un grand moment.


Claude Chanaud 



Retour
Sommaire
Montreurs d'ours






au Théâtre
La Bruyère


5, rue La Bruyère
75009 Paris

Location :
01 48 74 76 99



Mise en scène :

Stephan Meldegg





Une pièce de :

Paul Hengge





Pour visiter
le site du théâtre :

www.ddo.fr/labruyere