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Le dieu
du carnage


de Yasmina Reza




Quand LE DIEU DU CARNAGE s'amuse au THEÂTRE ANTOINE


Dans un appartement contemporain branché, deux ménages du type "bon chic bon genre" nous font entendre une belle et généreuse musique de tolérance. Auparavant, leurs deux gamins se sont disputés, injuriés et insultés puis l'un d'eux a été sauvagement blessé par l'autre. Cependant les adultes sont des adultes… que diable… et nous ne sommes plus à l'époque des cavernes où la force primait le droit ; alors, dès le début de la pièce, la maman du garçon blessé qui est militante des Droits de l'Homme et pleine de bonnes intentions rédige à l'intention des compagnies d'assurances un texte sur lequel les autres parents s'accordent. Tout baigne.

On pouvait imaginer qu'après cet échange de bons procédés, chacun rentrerait chez soi satisfait d'avoir réglé un problème de la vie courante et en espérant que l'éducation corrigerait un jour le comportement du petit brutal. Mais Yasmina Reza n'est pas la Comtesse de Ségur, née Rostopchine. Heureusement, car nous aurions sans doute été privés d'une comédie à la fois grinçante et rieuse où les nombrils se révèlent très vite sous les attitudes policées des quatre participants.

Leurs comportements nous interrogent à un double titre. UN / Pas éloigné du ménage paisible qui achète ses tulipes blanches au marché Mouton Duvernet ou très près de l'autre couple, celui de l'avocat d'affaire caché en permanence derrière son téléphone portable, y a-t-il en chacun d'eux (de nous…) un barbare attendant le conflit (ou les…) avec délectation ? DEUX / Parmi les nombreux sujets de discorde qui perdurent dans ce monde, est-ce que l'enfant n'est pas un des puissants motifs capables de faire basculer notre (fragile) objectivité ?

Yasmina Reza, lucide et drôle, brode sur ces deux sujets en proposant une série de comportements vraisemblables pour des parents qui vont d'abord prendre un verre en signe de règlement amiable. Dans le moment, ça baigne encore.

Mais contrastant avec l'humanisme affiché du début de la pièce et au fur et à mesure de leur conversation, les échanges des deux couples vont d'abord enchaîner du convivial vers un relationnel convenu puis déraper ensuite sur des révélations non maîtrisées : alors les "non dits" des vieux couples et un machisme latent vont rejaillir puis se greffer sur le problème récurrent de leurs descendants. Cela génère une imprévisible situation se traduisant sur la scène par une pagaille d'essence jubilatoire.

Isabelle Huppert, André Marcon, Valérie Bonneton et Eric Elmosnino forment un quatuor épatant et efficace dans cette dynamique de groupe, y compris quand Isabelle pousse au paroxysme son rôle de mère outrée. Voilà pour les nombreux spectateurs qui ont sans aucun doute des idées personnelles concernant l'éducation des enfants (notamment ceux des autres) et sur les failles de la vie. Mais dont les rires fusent tout au long de la pièce.

Claude Chanaud 
(12/03/08)    



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Montreurs d'ours






THEATRE ANTOINE


14, bd de Strasbourg
75010 PARIS

Location :
01 42 08 77 71



Mise en scène par


Yasmina Reza


avec
Isabelle Huppert
André Marcon
Valérie Bonneton
Eric Elmosnino






Editions Albin Michel
124 pages - 10 €