Le jeu de l'amour
et du hasard


de Marivaux





Il y aura bientôt trois siècles que LE JEU DE L'AMOUR ET DU HASARD est devenu une des comédies du théâtre français figurant parmi les plus jouées du répertoire. Quoique les mœurs aient heureusement changé et quoique les pères des années 2000 ne se mêlent plus guère de choisir l'époux de leur fille, l'intérêt pour cette pièce perdure aujourd'hui car sa verve comique a heureusement survécu aux souhaitables mutations de la société. Le metteur en scène XAVIER LEMAIRE nous en administre la preuve au théâtre MOUFFETARD.

D'évidence, le sujet est de notre temps car les unions contemporaines, sont souvent l'aboutissement d'une longue observation des deux partenaires. Mais MARIVAUX fut sans doute le premier dramaturge à placer ce besoin d'analyse des "promis" au cœur d'une comédie de mœurs et d'usages différents. Au moment où l'autoritaire chef de famille du XVIIIème siècle, véritable tyran domestique, dirigeait tout son monde et sélectionnait lui-même son entourage, y compris le mari de ses filles.

Néanmoins, dans cette pièce au marivaudage muselé, le père de famille nous apparaît généreux et tolérant puisqu'il va jusqu'à dire : "dans ce monde, il faut être un peu trop bon pour l'être assez". Il sera même le complice de ses enfants ce qui est tout à fait exceptionnel en ces temps-là.

On se rappelle que le subterfuge choisi par ces derniers (afin de mieux connaître leur éventuel "FUTUR") est celui du travestissement et de l'échange. Les situations dues aux usurpations de personnalités et la cocasserie des conjonctures donnent évidemment à cette comédie un aspect assez bouffon, notamment concernant les personnages d'Arlequin et de Lisette. Mais l'efficace équipe de la pièce participe à ce drame clanique tout en en soulignant avec pétulance et légèreté son côté caricatural. Et tout ceci mène le spectateur à un rire de connivence à double détente.

Enfin, on ne peut ignorer la critique sous jacente à cette œuvre car, avec quelques décennies d'avance, elle annonce le théâtre de Beaumarchais où la complicité des valets et des soubrettes avec leurs maîtres se transformera en une authentique revendication sociale.

Le public parisien de 1730 reçut très favorablement LE JEU DE L'AMOUR ET DU HASARD que MARIVAUX avait écrit pour l'actrice ZANETTA BENOZI. C'est elle dans le rôle de SILVIA, qui verra le noble et riche DORANTE tomber à ses genoux alors qu'il la croit une simple servante. Etonnement des classes sociales stratifiées  ! ! !

Précisons qu'au même moment, les comédiens étaient encore considérés par beaucoup comme des marginaux sulfureux et que la dépouille mortelle de la comédienne ADRIENNE LECOUVREUR qui n'avait pas fait acte de repentir de sa "scandaleuse profession" venait d'être jetée à la fosse commune. VOLTAIRE, autorisé à revenir d'Angleterre où il était exilé, protesta avec véhémence et rédigea un éloge funèbre la concernant. Et ce texte sera lu à la Comédie Française. Quelques conservateurs bloqués dans l'entendement ont sans doute cru rêver.

Ainsi, il y avait dans les différentes couches de la population française des ferments de changement qui vont s'épanouir jusqu'à la Révolution. Les scènes parisiennes, y compris le Théâtre Royal de Louis XV, n'ont pas pu les ignorer. Le Mouffetard perpétue très heureusement cette sensibilité des gens de scène à l'air du temps.

Claude Chanaud 
(22/01/08)    



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Montreurs d'ours






Théâtre Mouffetard
73 rue Mouffetard
75005 PARIS

Réservation :
01 43 31 11 99


Mise en scène
Xavier Lemaire


avec
Isabelle Andréani
Gaëlle Billaut-Danno
Bernard Carpentier
Julien Cigana
Xavier Clio
Christian Dubouis
Michaël Gaudeul

Décor
Caroline Mexme

Costumes
Brigitte Elbar

Lumières
François Eric Valentin

Assistant
Michaël Gaudeul