illustration Stéphane Trapier

Jusqu'à ce que la mort
nous sépare


de
Rémi De Vos




Jeu de maux au Théâtre du Rond-Point

Un adolescent de ma génération avait listé les caractéristiques souhaitables pour la réalisation d'un mariage idéal et les qualités nécessaires à une éventuelle épouse. Puis armé de cette énumération, raisonnée faute d'être raisonnable, il était passé sans état d'âme du stade de fiancé confiant à celui d'homme marié. C'est ainsi que je fus témoin d'un fiasco exemplaire.

Vis-à-vis des jupes de sa jeunesse, Simon, le héros de Jusqu'à ce que la mort nous sépare a pratiqué la politique inverse. Il a fui. Et il vit loin des deux femmes susceptibles de l'aimer avec outrance ou d'entraver sa liberté.

Dans la pièce de Rémi De Vos, ce garçon célibataire, léger d'apparence et original de comportement, perd sa grand-mère, ce qui est dans l'ordre des choses si on se réfère à l'âge de l'aïeule. La crémation de cette dernière provoque donc très normalement son retour à la maison maternelle. Evidemment Madeleine, sa mère, est là. Anne, une tendre amie de sa jeunesse, également. Et lui, il rapporte l'urne contenant les cendres.

Tout cela, qui procède du "non-évènement", contient les bases d'une dramaturgie imprévue où les deux femmes reprennent leurs danses de séduction interrompues. Et où le jeune homme s'enlise petit à petit dans une attitude plutôt ludique. Comme si le jeu – notamment celui des conversations d'apparences anodines ou superficielles – prenait la place du destin.

Jusqu'à ce que la mort nous sépare est une comédie baignant dans un humour sombre situé constamment entre cruauté et lucidité.
Dans les faits, c'est l'analyse subtile de certains pièges féminins posés aux représentants de l'autre sexe, celui qui est supposé "fort". Et la pièce nous arrache en permanence les sourires d'une connivence attendrie avec ce grand dadais s'amusant avec les mots. Voire les maux. Cependant, pour Simon, la fuite n'apparaît plus de circonstance. Après quelques coups de fil à l'extérieur ressemblant peut-être à des appels au secours et au moment où son jeu de mots tourne court, il change de comportement, baisse la garde et semble se résigner à l'idée d'un mariage avec Anne.

Son OUI relève-t-il de l'espoir naïf ou du pari stupide ?

Catherine Jacob et Claude Perron nous présentent ce jeu de rôle avec une grande justesse de ton. Micha Lescot est parfait en célibataire primesautier. Et la mise en scène d'Eric Vigner fait ressortir un rire sans aucune concession aux effets faciles. La démonstration est d'autant plus exemplaire que le prétexte initial de la pièce est mince.

Claude Chanaud 
(18/01/07)    



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Montreurs d'ours




illustration Stéphane Trapier

au Théâtre
du Rond-Point


2 bis, avenue
Franklin D. Roosevelt
75008 Paris



Location :
01 44 95 98 21
et sur le site
du théâtre :
www.theatredurondpoint.fr














le texte
est disponible
aux éditions
Actes Sud-Papiers

128 pages - 12,50 €