Cabaret


aux Folies Bergère






Goodbye to Berlin


En lisant GOODBYE TO BERLIN, avant d'aller revoir CABARET, j'ai compris comment le livre de Christopher Isherwood avait fourni une structure aussi solide et une aussi forte densité à cette comédie musicale. C'est que l'histoire tragique du XXème siècle sert de trame au spectacle et lui donne ainsi une dimension quasiment mythique. Il y a évidemment cette raison. Plus d'autres qui sont indéniablement d'essence artistique.

L'auteur annonce la couleur ainsi : Un soir d'octobre 1930, environ un mois après les élections, il y eut une grande bagarre dans la Leipzigerstrasse. Des bandes d'énergumènes nazis se livraient à une manifestation antijuive. Ils maltraitaient les passants aux cheveux trop noirs, au nez trop long et brisaient des vitrines de magasins juifs. Je n'en garde le souvenir que parce qu il a marqué mon premier contact avec le vie politique de ce pays…

Cette allusion à la violence aurait pu être une simple évocation destinée à fixer l'époque, mais elle apparaît surtout comme le début d'une lente prise de conscience, à savoir que l'inhumanité la plus systématique allait couronner la montée en force des nazis. Et que, sans état d'âme, ce parti portait en germe la gamme sophistiquée des barbaries multiples du XXème siècle. Dans le dernier chapître du livre le dialogue d'un couple adolescent nous le confirme : Il faut que le sang soit répandu, dit un jeune nazi en état d'ivresse. Mais bien sûr… qu'il sera répandu, mon chéri, lui répond sa compagne, le Führer nous l'a promis dans son programme.

Ainsi, le décor est planté pour un CABARET qui ne vous laisse pas indemne, Dans l'actuel spectacle des Folies Bergère, les scènes qui vont se succéder annoncent également les ignominies totalitaires et l'inimaginable Shoah.

Elles fournissent, ipso facto, des raisons de toujours réfléchir à la montée insidieuse des dictatures. Mais, de plus, cette exploration du Berlin des années 30 par un jeune dilettante anglais va également proposer aux spectateurs un éventail de personnages typés de la coruscante nuit berlinoise et des boites couvrant la gamme des possibles à une homosexualité imaginative. Dans le contexte de ces cabarets où des travestis hissent la dérision au niveau d'un des beaux arts, on va sentir, en parallèle, monter la vague des interdictions et la fin des libertés. La leur… pour commencer ! Et le grand affectif qui traverse cette histoire va, de plus, tomber amoureux de la piquante Sally Bowles, laquelle n'aime que chanter et danser dans ces nuits fauves.

Je ne vous raconterai pas l'histoire. Elle est tellement plus émouvante sur la scène. Pour ceux d'entre vous qui ont aimé au cinéma le Cabaret de Bob Fosse avec Liza Minnelli, voilà un tonique retour aux sources qui s'est magistralement rodé à Broadway. Notre vigilance devant l'idéologie perdure, mais elle se conjugue d'une admiration pour la musique et les chorégraphies, là où les paillettes se font rythme avec une rare élégance et une efficacité communicative. L'ovation finale sanctionne un professionnalisme sans faille. A la fin du spectacle, le public très divers de CABARET n'avait apparemment pas la nostalgie des girls emplumées que les Folies Bergère exhibaient jadis aux provinciaux en goguette, venus visiter le salon de l'auto.

Claude Chanaud 
(20/11/06)    



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Montreurs d'ours





Les Folies Bergère

32, rue Richer
75009 Paris

Réservation :
01 44 50 50 10

www.foliesbergere.com




Livret de
Joe Masteroff

Adaptation française
des dialogues
Jacques Collard,
des chansons
Eric Taraud

Compositeur
John Kander

Mise en scène
Sam Mendes

Chorégraphie
et mise en scène
Rob Marshali

Dirction musicale
Fred Lassen

Avec
Claire Pérot,
Fabian Richard,
Catherine Arditi,
Pierre Reggiani,
G. Guerrier,
Patrick Mazet,
Delphine Grandsart,
les Musiciens
et l'Orchestre.






Christopher Isherwood
Adieu à Berlin

Livre de Poche Biblio