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Photo © Manuel Pascual



Confidences
à Allah


de
Saphia Azzeddine







Ma vie est mon djihad*


Quand, au lieu d’aller à l’école, une fille d’un Maghreb déshérité garde les brebis d’un père, aussi gros connard que feignassou professionnel, il n’est pas étonnant qu’elle croie un jour à des élucubrations de fort calibre.

Je ne parle pas de sa croyance en Allah auquel elle va faire ses confidences pour son nécessaire soulagement mais de sa certitude d’être encore vierge alors qu’elle est en attente de maternité. A ce sujet, Miloud, l’homme qui abuse de son innocence en échange d’un yaourt à la grenadine, lui a raconté une bien belle histoire et elle se considère toujours intacte du moment que ses poils pubiens ne sont pas tombés. En revanche, elle supporte mal son odeur plus primate qu’eau de toilette Guerlain. « Un jour en le suçant j’ai reniflé le pli de ses couilles et j’ai failli vomir. »

Voilà les prémisses d’une vie affligeante et cruelle que la petite bergère Jbara va supporter dans la tente familiale en peau de chèvre avant de fuir devant la colère du père lors qu’il apprend son état de fille enceinte. En effet, elle est conditionnée par une famille aux mœurs restées archaïques et un environnement où, de tradition, les filles sont des esclaves données par la nature. Et le reste est péché…

Les multiples souffrances qu’elle endure avant d’en tirer des leçons positives sont autant de paliers à gravir vers un mieux être éventuel mais comme elle est d’une intelligence bien supérieure à la moyenne, elle remet en question la tradition moyenâgeuse de sa famille. Et, sous la plume de Saphia Azzeddine, elle va progressivement réagir à ce traditionnel conditionnement, dénonçant évidemment l’oppression subie par les femmes dans leur propre famille et d’autre part les problèmes de leur adolescence en contact avec le désir brutal des machos.

La puberté en toute innocence, la prostitution pour pouvoir vivre moins mal et la prison pendant trois ans vont être son parcours initiatique. Et comme les cheminements des destinées sont souvent mystérieux, le sien va trouver un équilibre de cette manière sur laquelle Saphia Azzeddine et Alice Belaïdi lèvent le voile. Saphia a écrit avec humour et verve vengeresse ce texte à la fois émouvant et cru sur l’oppression subie par les femmes de différents pays du monde. Et Alice le vit avec intensité sur la scène de la Gaîté Montparnasse.

La première chasse efficacement l’obscurantisme ; la seconde transcende ce témoignage avec un talent d’excellence. On n’a pas fini de parler d’elles.

Claude Chanaud 
(06/12/09)    

* Ma vie est mon combat



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Montreurs d'ours





Théâtre de la Gaîté Montparnasse

26, rue de la Gaîté
75014 Paris

Réservation :
01 43 20 60 56





Avec
Alice Belaïdi

Mise en scène
Gérard Gelas

Production
Théâtre du Chêne Noir









Éditions Léo Scheer