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La peur

d’après la nouvelle de
Stefan Zweig




Fenêtre sur peur

Il faut vous avouer chers lecteurs d’Encres Vagabondes, que nous étions circonspects, voire un brin narquois, à l’idée  de nous rendre au Théâtre Michel voir l’adaptation de la nouvelle La peur de Stefan Zweig.
Eh bien, nous avons déchanté ! Elodie Menant l’a fait et comment !

L’intrigue est simple.
Alors qu’elle ressort de l’appartement de son amant Edouard, Irène est prise à partie par une femme qui la traite de « garce », avant de la soumettre, la bouche tordue de haine, à un chantage : la dénonciation à son mari Fritz de sa situation adultérine. Terrorisée, la jeune femme verse de l’argent à la manipulatrice.
De retour à la maison, Fritz, si attentif en apparence, tellement accaparé par son métier d’avocat, semble deviner le désarroi de son épouse. Il manifeste à son égard une sorte de bonté et d’attention.
Dans les jours qui suivent, Irène reçoit des lettres de chantage ; la maîtresse-chanteuse ne la lâche pas. Dès lors, s’installe chez la jeune femme une peur aux allures cauchemardesques. Sa vie se transforme en un cycle d’angoisse et de détresse ; la manipulatrice allant jusqu’à lui voler sa bague de fiançailles.

Irène (Hélène Degy déploie une belle énergie), candide et craintive, prise dans le remords de sa situation adultérine, se débat dans un chaos plus grand que jamais. Elle n’ose avouer à Fritz son adultère. Celui-ci la traite comme une malade avec une prévenance qui la rend confuse. Ce sont des petites phrases assassines décochées, ici ou là, qui font qu’au bout du compte le couple bien rangé de Fritz et Irène s’étouffe.
On retrouve, en filigrane, la propension d’un Zweig souvent attelé à dénoncer l’atmosphère terne de la vie bourgeoise.

Quant à la réussite de cette pièce, elle tient à l’adaptation hybride d’Elodie Menant. Mélangez les ingrédients d’une intrigue à la Hitchcock – angoisse, frayeur à l’extrême d’un individu, suspense – à la magistrale capacité d’analyse psychologique des sentiments humains de Stefan Zweig et vous obtenez un cocktail dramatiquement déroutant.
La mise en scène est vive avec un suspense habilement ménagé.

Et puis, une belle prestation de trois étonnants comédiens. Ils savent tout faire. Le décor, ils en ont la charge ! Les cloisons amovibles, montées sur roulettes, agrémentées d’un décorum années 60, c’est eux qui les déplacent en fonction de l’action dramatique multipliant, sans en abuser, les signes de spectacle.

Eh bien oui, nous avons été bluffés ! Tout simplement. La chute finale, machiavélique, à elle seule vaut le détour.
Et, comme une continuité de son succès au Festival d’Avignon, la pièce poursuit son petit bonheur de chemin.
Un vrai régal !

Patrick Ottaviani 
(20/10/16)    



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Théâtre Michel

38, rue des Mathurins
75008 Paris

Reacute;servations :
01 42 65 35 02



Mise en scène,
scénographie
et adaptation
Élodie MENANT

Avec
Hélène DEGY
Aliocha ITOVICH
Ophélie MARSAUD

Décor
Olivier DEFROCOURT

Costumes
Cécile CHOUMILOFF
et Sylvie LEFRAY

Lumières
Marc AUGUSTIN

Graphistes
Mathieu STORTOZ
et Salima GLAMINE