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Ravel

de
Jean Echenoz





Sur la grande scène du Théâtre Artistic Athévains, Maurice Ravel (interprété par Michel Ouimet) en costume blanc et souliers vernis s'extrait d'une baignoire bleue, tandis qu'un narrateur entonne "On s'en veut quelquefois de sortir du bain. D'abord il est dommage d'abandonner l'eau tiède et savonneuse, pour l'air brutal d'une maison mal chauffée".
Nous sommes en 1928, à Montfort-l'Amaury, dans la demeure du célèbre compositeur. Ravel s'apprête à partir pour sa tournée américaine.
Adulé par le Tout-Paris, il est au faîte de sa gloire.

Tout est réuni dans cette pièce réalisée à partir du roman de Jean Echenoz pour nous faire revivre les dix dernières années de la vie de Maurice Ravel (1875-1937). D'abord l'époque. Les années trente. A la fois légères et craintives après les affres de la Première Guerre mondiale. Et surtout il y a Ravel, personnage central, efficacement mis en scène par Anne-Marie Lazarini. Elle a identifié avec précision les attitudes de cet homme à taille de jockey (le grand compositeur mesurait 1,61 m) qui fume Gauloise sur Gauloise ou sculpte des canards avec de la mie de pain pour tuer l'ennui.

Deux narrateurs (interprétés par Coco Felgeirolles et Marc Schapira) lisent des extraits du livre de Jean Echenoz et entourent Ravel. En alternance avec les lectures, il y a la musique du spectacle, composée par Andy Emler, sorte de double musical chargé lui aussi de nous raconter. Face à son piano bleu, il interprète brillamment des extraits du Concerto pour la main gauche, le thème du Boléro ou un morceau de Promenade dans le Var.

L'écriture d'Echenoz a exploré avec minutie le quotidien d'un homme au destin hors du commun. Les failles tragiques derrière la célébrité. Protégé des à-côtés du monde par une bulle de gloire et de luxe, Ravel apparaît comme un être lisse, distant et secret. Un farfelu élégant qui, dès que les mondanités s'éteignent, endigue au mieux qu'il peut les velléités de la solitude.

Ainsi vont les dix dernières années du célèbre compositeur.
Il va et vient. De concert en concert. De sa maison de Montfort-l'Amaury à Saint-Jean-de-Luz où il retrouve ses racines basques. Jusqu'à ce stupide accident d'automobile. Ravel est gravement blessé. A partir de là, commence pour lui une longue et douloureuse dégradation d'ordre neuro-psychologique. Il ne peut plus écrire et finit par perdre définitivement contact avec la réalité.

Il faut souligner également le fabuleux décor de François Cabanat. Cette large scène toute de bleu vêtue – avec son piano bleu, sa baignoire bleue, sa Peugeot 201 bleue – où navigue entre dandysme, gloire et ennui, ce petit bout d'homme que l'on finit par aimer.
Et puis le texte de Jean Echenoz nous envoûte jusqu'à la dernière Gauloise fumée par l'atypique Maurice Ravel.
Une pièce très réussie nous est proposée par le Théâtre Artistic Athévains.
Très applaudie.
Encore bravo !

Patrick Ottaviani 
(06/04/13)    



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Une loge
pour le strapontin












Artistic Athévains

45 bis rue Richard-Lenoir
75011 Paris

Métro : Voltaire

Réservation :
01 43 56 38 32





Mise en scène
Anne-Marie Lazarini

Avec
Coco Felgeirolles
Michel Ouimet
Marc Schapira
et en alternance
Andy Emler
et Yvan Robilliard

Assistant
à la mise en scène
Bruno Andrieux

Musique originale
Andy Emler

Décor et lumières
François Cabanat

Costumes
Dominique Bourde
avec la collaboration
de Henri Lazarini