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L'apprentie
(Mai 2020)
228 p – 13,50 €

Maurice LEBLANC
(1864-1941)

De minuit
à sept heures


Maurice Leblanc et Arsène Lupin
Né à Paris en 1864 dans une famille bourgeoise, Maurice Leblanc, refuse la carrière industrielle proposée par son père et "monte à Paris" en 1888 pour suivre des études de droit. Mais sa passion est l’écriture. Il collabore à plusieurs journaux et publie en 1890 son premier recueil de contes, Des couples, dédié à Guy de Maupassant. Pendant quinze ans, il alterne les nouvelles et les romans.
En 1905, Pierre Laffite lui demande une nouvelle policière pour son magazine Je sais tout. L’arrestation d’Arsène Lupin rencontre immédiatement le succès et Maurice Leblanc écrit alors neuf autres nouvelles qui seront réunies en 1907 dans le recueil, Arsène Lupin, gentleman cambrioleur. Un nouveau personnage mythique est né.
Les aventures d’Arsène Lupin comprennent 39 nouvelles, 18 romans, et 5 pièces de théâtre.

De minuit à sept heures
Ce roman, publié en feuilleton (41 épisodes) dans Le journal en 1931, puis en volume chez Laffite l’année suivante, n’est pas une aventure d’Arsène Lupin. Enfin pas vraiment. Mais le personnage de Gérard d’Énouville lui ressemble étrangement…
On y retrouve le beau héros chevaleresque mais pas toujours désintéressé, capable de se métamorphoser comme dans les romans du XIXe siècle. Chez Paul Féval, personne ne reconnaissait le chevalier de Lagardère sous les traits du Bossu. Ici, Gérard d’Énouville peut aisément se cacher sous l’apparence d’un mendiant sur les marches d’une église.
« Pour remercier, il joua encore un petit air d'accordéon, puis enveloppa l'instrument qu'il suspendit à son épaule, auprès de ses besaces, et, ainsi chargé, le dos rond, la tête basse, l'aspect résigné d'un vieux dont la vie est de suivre les chemins au hasard des jours et des aumônes, il s'en alla clopinant. À quelque distance du village, il s'engagea dans un petit bois et fut hors de vue.
Alors, il se redressa, s'étira les bras avec un soupir de soulagement, et arracha le bandeau qui lui couvrait la face. Comme par magie, il fut un autre homme, un homme de vingt-huit à trente ans, de taille haute et svelte, athlétique ; son visage régulier exprimait l'intelligence vive, l'énergie décidée, l'audace sûre de soi. Ses yeux bleus avaient un regard paisible presque gai, et qui pouvait, certes, aux heures de détente, devenir affectueux et tendre. »
Pendant la guerre (14-18), Gérard d’Énouville, jeune engagé volontaire, a rencontré Ivan Baratof, un financier et spéculateur russe, chassé de Russie par la Révolution de 1917. Une fois démobilisé, Gérard s’est installé en Pologne où il remplit, pour le plaisir de l’aventure et des conquêtes féminines, diverses missions, rarement honnêtes mais toujours lucratives, au profit de Baratof qui, lui, se montre sans scrupules ni pitié.

Une héroïne qui n’a pas froid aux yeux
L’intrigue de ce roman se déroule pourtant à Paris où Nelly-Rose, « jeune fille moderne » et scientifique, a décidé d’organiser une grande loterie pour sauver le laboratoire où elle travaille. Chacun doit fournir quelque chose susceptible de servir de lot et quand on lui demande ce qu’elle peut offrir elle-même, elle répond :
« – Moi, mais je donnerai tout ce qu'on voudra. Je suis prête à tout ce qu'on voudra ! »
Pas vraiment consciente de l’ambiguïté de sa proposition, la voilà lancée dans une aventure qui va vite la dépasser.
Un article paraît dans une revue polonaise :
« Beau geste d'une jeune fille française en faveur d'une loterie ouverte au profit de la Maison des laboratoires. Elle est prête à donner tout ce qu'on lui demandera à la personne qui s'inscrira pour cinq millions. »
Quelques jours plus tard un chèque de cinq millions arrive au laboratoire avec une courte lettre :
« Mademoiselle,
Aurez-vous la bonne grâce, le jour même où je vous le demanderai, et quelles que soient les circonstances, de me recevoir, dans votre boudoir, de minuit à sept heures du matin ? Si oui, vous voudrez bien remettre le chèque ci-inclus à son destinataire. Si non, déchirez-le. Sentiments très respectueux,
Ivan Baratof. »
Le chèque est encaissé par le laboratoire et Nelly-Rose commence à craindre ce qui pourrait se passer dans son boudoir de minuit à sept heures.
Baratof a sa petite idée là-dessus mais Gérard en a une autre.
Une course contre la montre, dont tout le monde ne sortira pas vivant, peut s’engager entre ces trois personnages… et quelques autres.
 

« Une maison d’édition prometteuse »
« Créée en 2018, l'Apprentie est une jeune maison d'édition prometteuse dont la volonté est de grandir au fil des promotions de licence professionnelle de l'IUT Bordeaux Montaigne qui se succèdent à sa tête. Aujourd'hui, la deuxième génération d'apprenties éditrices et apprentis éditeurs propose une collection de classiques de la littérature policière. »

Cet ouvrage est très bien réalisé avec une intéressante préface de Cédric Hannedouche, agrégé de Lettres Modernes, spécialiste de l'œuvre de Maurice Leblanc et de la place du policier dans la fiction, qui a soutenu une thèse autour du personnage d'Arsène Lupin.
Il aurait peut-être été préférable de publier cette préface en postface pour permettre au lecteur de se lancer dans cette aventure sans en connaître tous les rebondissements et la façon dont elle se termine. Ne la lisez donc qu’après avoir lu le roman si vous voulez jouer le jeu et vous laisser emporter par le suspense savamment entretenu par le feuilletoniste.

Ce livre est une belle initiative à encourager pour redécouvrir des ouvrages qui ont gardé tout le charme de leur époque grâce au talent de leurs auteurs.

Serge Cabrol 
(01/07/20)    




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Maurice Lblanc
(1864-1941)


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