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Janet FLANNER


Chroniques
d'une Américaine à Paris
1925-1939



Après guerre, dans les années vingt, une petite colonie d'Américains s'installe peu à peu à Paris. Elle est composée d'ambitieux qui ont traversé l'Atlantique en troisième classe sur des Titanic qui arrivaient à quai (à cette époque seuls les albatros pouvaient faire ce voyage par les airs). Ils étaient pour la plupart jeunes, fauchés et pleins d'ambitions, I am the King of the World aurions-nous pu entendre venant du plus secret de leur inconscient. Pour eux Paris est une fête !... Ils la feront de Montmartre à Montparnasse, insouciants, souvent amoureux, souvent affamés, toujours assoiffés de gloire... Parmi eux Ernest ! (Hemingway bien sûr !), James Joyce, Ezra Pound, Scott Fitzgerald et d'autres... Ce petit monde d'expatriés côtoie aussi l'underground des artistes parisiens de l'époque, les peintres qui s'affichaient à La Rotonde, les écrivains qui fréquentaient Les Deux Magots.

Sur cet échiquier de futurs Rois du monde, de futures Reines, de Fous et de pensionnaires de Tour d'ivoire, un petit pion : Janet Flanner ! Elle vit depuis 1922 à Paris lorsque Harold Ross lui confie, en 1925, la rédaction d'une rubrique du New Yorker qu'il vient de créer : "Letter from Paris"… mais Harold la met d'emblée en garde : Je me fous de votre ressenti, je veux savoir ce que pense Paris ! Ainsi de 1925 à 1939 Janet rédigera ses lettres de Paris avec les yeux d'une parisienne naturalisée. Ses chroniques signées du pseudonyme de Genêt, traversent l'Atlantique, elles sont la vitrine de la vie parisienne de l'époque. Des noms pour nous aujourd'hui oubliés sont évoqués, par exemple celui de Maurice Rostand, le fils d'Edmond. Qui se souvient encore de Maurice ? Des faits divers également oubliés, par exemple la fermeture du célèbre Lapin agile : Le Lapin agile, dernier cabaret de Montmartre, installé à l'ombre des frondaisons, jadis fréquenté par des hommes devenus célèbres depuis, tels que Guillaume Apollinaire, Max Jacob, Pierre Mac Orlan et André Salmon, va fermer ses portes. Le vieux Frédéric, le patron barbu et chapeauté de velours, qui avait trinqué avec la plupart d'entre eux, gratté sa guitare, accordé du crédit aux poètes et fait payer le prix fort aux riches, ne peut plus s'en sortir à cause des nouvelles taxes de nuit qui frappent la Butte.

En 1972 ces chroniques sont réunies et publiées par Irving Drutman sous le titre de Paris Was Yesterday 1925-1939. Elles seront traduites en 1981 par Roland Delouya pour le compte des éditions Mazarine sous celui de Chroniques d'une Américaine à Paris 1925-1939, titre récemment réédité aux éditions Tallandier (collection Texto, novembre 2011).

C'est un voyage dans le Paris que nous aimons que nous offre ce livre. Janet appartient un peu à notre mémoire et surtout à notre nostalgie. Il est curieux de découvrir a travers les yeux d'une jeune américaine les hommes célèbres de l'époque (qu'ils soient issus du monde politique ou bien de celui des Arts), ces hommes que nous connaissons bien, tout autant que les événements oubliés de notre histoire que Janet Flanner ravive. Des pointes d'humour en petites touches parsèment ses chroniques, un petit sourire en coin parfois bien appuyé. Un régal...

Ce recueil débute par les feux de la Revue Nègre au Théâtre des Champs-Elysées dans laquelle évolue pour la première fois à Paris l'inoubliable Joséphine Baker (c'est la fête !) et s'achève par la déclaration de guerre de 1939 avec cette dernière phrase sans doute prophétique de madame Flanner : C'est, en fait, un lieu commun que cette guerre, puisque ce n'est rien d'autre qu'une lutte pour la liberté. C'est seulement à cause de sa dimension potentielle qu'elle peut, hélas ! sonner le glas de la civilisation.

Ce livre est une promenade réjouissante dans notre proche passé de Parisien, n'hésitez pas à emprunter son parcours.

David Nahmias 
(20/02/12)    





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Pour mémoire













Tallandier

Collection Texto, 2011
316 pages - 9,50 €



Traduction
Roland Delouya









Janet Flanner
(1892-1978)