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Alan PARKS


Les morts d’avril


Alan Parks excelle dans l’art du rebondissement, du renversement de situation et autres surprises littéraires. Ses courts chapitres rappellent le rythme des feuilletons du XIXe siècle dont chaque épisode créait l’irrésistible envie de savoir ce que réservait le suivant. On parle aujourd’hui de "page turner" et c’est très adapté à ce roman dont on tourne les pages avec avidité.

Son personnage récurrent est l’inspecteur Harry McCoy qui vit et enquête à Glasgow où nous le retrouvons pour la quatrième fois, chaque roman portant le nom d’un mois : Janvier noir, L’enfant de février, Bobby Mars forever et maintenant Les morts d’avril.
En ce mois d’avril 1974, McCoy n’est pas au mieux de sa forme. « Il avait trente ans passés, habitait seul dans un appartement merdique, sa carrière semblait au point mort, il avait déjà l'image d'un solitaire. Il buvait trop, ça lui avait même provoqué une saloperie d'ulcère. Il avait peut-être besoin de changement, lui aussi. Quelque chose de radical avant d'être trop vieux et de se retrouver coincé où il était. Restait à trouver quoi. Il se promit d'y réfléchir sérieusement quand toute cette histoire serait terminée. » Malheureusement pour lui cette histoire ne fait que commencer et il n’en imagine pas encore toute la complexité. En fait, il va devoir faire face à plusieurs affaires en même temps et pas des plus simples.

Tout d’abord il y a des bombes qui explosent à Glasgow, dans un appartement puis dans une cathédrale. Pas des charges importantes. Quelques dégâts mais pas de victimes sauf pour la première qui a semble-t-il explosé entre les mains de celui qui la préparait. On n’est pas en Irlande et visiblement, ce ne sont pas les professionnels de l’IRA qui sont derrière ces bizarres agissements.

Ensuite, il y a un Américain, le capitaine de vaisseau en retraite Andrew Cooper qui aborde McCoy pour lui demander de l’aider à retrouver son fils, Donny, 22 ans, marin lui aussi, qui a disparu d’une base militaire proche de Glasgow où son navire est stationné. Cette disparition ne relève pas des attributions de McCoy mais l’Américain est à la fois sympathique, inquiet et très insistant.

Et puis, il y a Stevie Cooper, l’ami d’enfance que McCoy va chercher à sa sortie de prison. Un ami très encombrant, devenu chef de gang et même gros bonnet de la pègre pendant que McCoy devenait flic. Leur relation est complexe mais les années d’enfance cabossée passées dans les mêmes internats et la protection que Stevie assurait à McCoy contre « les brutes et les frères chrétiens » créent des liens difficiles à rompre. Stevie est un violent capable de devenir incontrôlable par moments. Il a quelques comptes à régler après ses six mois de prison et personne ne l’en empêchera. Quant à connaître la nature de ces comptes, McCoy ne le découvrira que très tard.

Du côté de la disparition du fils Stewart, McCoy va comprendre qu’il s’est dangereusement approché de gens pas fréquentables. En ces années de guerre ouverte entre l’IRA, l’armée loyaliste, l’armée britannique, les services secrets, les groupes paramilitaires et les extrémistes de tous bords, il fallait faire attention où l’on mettait les pieds et Donny, voulant bien faire, s’est montré très imprudent.
Malgré ses réticences, McCoy est bien est obligé de s’en mêler car du sang et des affaires du jeune marin sont retrouvés dans l‘appartement de la première explosion. Qu’allait-il donc faire dans cette galère ? Qu’est-il devenu ? Prépare-t-il d’autres attentats ?

 

De page en page, on voit les affaires se complexifier, s’enchevêtrer, les apparences se révéler fausses, les leurres couvrir les vraies motivations, les alibis se construire et se détruire à une vitesse vertigineuse et, au milieu de tout ça,  McCoy s’efforçant de faire correctement son boulot, prenant tous les risques pour démêler les écheveaux, empêcher Stevie de se jeter dans des situations inextricables, mettre fin à la vague d’attentats qui monte en puissance et retrouver le marin dont le père est  de plus en plus désespéré… C’est beaucoup pour un seul homme d’autant plus qu’il doit rassurer en permanence son adjoint, Wattie, qui manque encore d’assurance et de confiance en lui…

On vagabonde de jour et de nuit dans les rues de Glasgow en 1974, ses bars et ses quartiers mal famés. Plus qu’un décor, c’est une atmosphère et un voyage passionnant dans le temps et l’espace.
On ne s’ennuie pas une seconde en accompagnant les personnages d’Alan Parks, très différents les uns des autres mais tous aussi motivés pour aller jusqu’au bout de l’action qu’ils ont engagée au risque de leur vie.
À peine les morts d’avril sont-ils enterrés qu’on attend déjà de savoir de quoi mai sera fait pour Harry McCoy. Une série addictive dont les premiers volumes ont maintenant paru en poche. Le précédent, Bobby Mars forever, vient de remporter le Grand Prix Mystère de la critique 2023. Difficile de résister pour les amateurs de romans noir et de dépaysement.

Serge Cabrol 
(11/04/23)    



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Noir & polar







Alan PARKS, Les morts d’avril
Rivages / Noir

(Mars 2023)
448 pages - 23,50 €


Traduit de l’anglais (Écosse) par Olivier Deparis







Alan Parks,
né en Écosse en 1963, s’est lancé dans un cycle de douze romans noirs situés à Glasgow dans les années 70, chacun comportant le nom d’un mois dans son titre.