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En attendant Dogo est l’histoire d’une disparition inexplicable, celle d’un trentenaire parisien et écrivain solitaire dont les débuts de roman envoyés aux éditeurs ne lui valent que des refus. « Chaque phrase contient en germe un roman à venir » aurait dit Raymond Roussel grand maître du disparu. La famille est anéantie. Six mois plus tard, ils sont toujours sans nouvelles, cartes de paiements et téléphone portable n’ont plus été utilisés, la piste criminelle a été évacuée par la police et le mystère reste entier. Les détectives privés, magnétiseurs et charlatans divers consultés par la mère ne se sont avérés d’aucun secours. Une personne majeure peut disparaître, changer de vie et de pays sans avoir de comptes à rendre, mais pourquoi Étienne se serait-il évaporé ainsi sans explication ? Est-il toujours vivant ? Dans ce cas où pourrait-il bien être ? Simone, infirmière de son état et sœur complice du disparu, n’arrive pas à imaginer que celui qu’elle surnommait Dogo ait volontairement pris le large en les laissant tous dans l’angoisse. Alors, dans une France qui s'englue dans une crise sanitaire, sociale et politique, qui entre confinement, paralysie des transports, panne d’électricité et pénuries frôle l'insurrection, elle décide de collecter tous les indices qui pourraient l’aider à le retrouver ou par défaut au moins comprendre ce qu’il s’est passé. « D’abord, comme gadget, on avait eu la pandémie. Nous en sommes sortis exsangues. Il a fallu tout reprendre, tout recommencer, et, comme prévu, ça n’a pas bien fonctionné. » « On s’approchait lentement mais sûrement des élections, le foutoir était total, les candidats jouaient avec un sérieux pénible aux chaises musicales, personne n’y comprenait plus rien. » De Nantes avec la rencontre d’une ex-amoureuse, à Sperlonga en Italie où des souvenirs d’enfance heureux les attachaient, en Haute-Provence près de Digne où, dans un village investi par une communauté autonome, un éditeur de poésie semblait avoir projeté avec Étienne de regrouper dans un recueil illustré ses différents débuts de romans truffés de pastiches, affublés de titres abscons et laissés orphelins, Simone suit toutes les pistes qui s’ouvrent à elle. Au fil de ses rencontres plus ou moins utiles mais parfois riches humainement comme celle de ce vieil éditeur anarchiste très attachant, elle acquiert peu à peu la certitude que son frère est bien vivant et que c’est de façon délibérée qu’il les a abandonnés. Serait-il à Lübeck qu’il mentionnait de façon récurrente dans ses manuscrits ? À Amiens où serait immatriculée la voiture de luxe dans laquelle certains de ses interlocuteurs pensent l’avoir entrevu ? « Je n’étais pas sur un petit nuage noir, j’étais en train de me noyer dans une fosse septique (…) Mon cerveau comme la France. En stade maison de retraite. » Peu à peu à l’angoisse se substituent la déception et la colère. Parallèlement, une troupe de marionnettistes lyonnais composée de Guignol, Gnafron et Madelon, après avoir interprété avec succès des saynètes pour enfants parodiant les travers de notre société derrière un petit castelet dans les rues de Lyon, décide suite à un incendie de passer du spectacle aux actes en commettant des actions politiques spectaculaires. C’est à eux que reviendra l’honneur de conclure cette histoire foutraque…
C’est par l’intermédiaire de Simone, infirmière sympathique et attachante dont l’acharnement à découvrir la vérité est à la hauteur de l’amour qu’elle porte à son frère, que le lecteur découvrira Etienne et l’histoire de son étrange disparition. Si la naïveté et l’inexpérience de celle que rien ne prédestinait un jour à un tel jeu de piste dans un climat douloureux de déstabilisation affective de la cellule familiale apportent initialement à son enquête une certaine irrationalité, provoque des errances et semble ralentir l’intrigue, le scénario trouve bientôt dans son déroulé sa dynamique propre et sa cohérence jusqu’au retournement final qui en bluffera plus d’un. Enquête, littérature et critique sociale s’entremêlent ici avec autant de tendresse que de colère, de rire que d’inquiétude. Cette comédie satirique est « une vraie pièce de Shakespeare interprétée par des punks no future » comme l’écrit Pouy dans un grand éclat de rire jaune qui cache mal au mieux sa mélancolie au pire son désespoir que par pudeur et par esprit de résistance il travestit en farce aussi cynique que généreuse et jubilatoire. Le lecteur embarqué dans cette étrange aventure, dans ce grand écart entre légèreté et effroi, se régale. Dominique Baillon-Lalande (21/02/22) |
Sommaire Noir & polar ![]() Gallimard / La Noire (Janvier 2022) 208 pages - 18 € Version numérique 12,99 €
Bio-bibliographie sur Wikipédia Découvrir sur notre site d'autres livres du même auteur : Le rouge et le vert La farce du destin Train perdu wagon mort La récup' Samedi 14 Tout doit disparaître Ma ZAD La mère noire Le marais pot-de-vin |
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