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Un premier roman, qui dès le début nous offre des personnages bien trempés. Le début du roman semble classique. Le tableau est en place, décor, descriptions et mouvements des premiers personnages. Ainsi, sitôt arrivée dans cette ville notre capitaine va être confrontée à un crime. En effet, une jeune fille a été tuée en pleine rue et quelques indices semblent se diriger vers un clochard, figure connue, qui devient suspect mais pour l’instant reste introuvable. Les scènes à venir vont nous permettre de suivre une affaire, d’en supposer une autre, et de nous laisser prendre par certaines réflexions. « Quelque chose, décidément la dérangeait. Un truc, quelque part. Ce n’était qu’une impression, mais elle ne connaissait que trop bien cette petite alerte qui clignotait dans un coin de sa tête. » Donc quelque chose grince ? Et là, on ne peut s’empêcher de penser à Simenon qui nous donnait d’un coup de plume la teneur de l’atmosphère, comme les pensées secrètes des personnages, principaux et secondaires, histoire d’orienter notre esprit. Et justement ce jeune auteur va aussi distiller informations judicieuses et secrets à peine dévoilés, mais avec une logique personnelle qui aurait pu nous paraitre inopportune ou peut-être nuire au suspense, mais qui s’avèrera ô combien efficace ! Donc, la capitaine va rencontrer un certain Max, mi-marginal, mi-clochard, qui habite sous une tente, qui va jouer un certain rôle dans cette histoire et en profite pour nous faire part, à l’occasion, de quelques-unes de ses pensées : « Triste génération où tout se consomme, où l’on se considère soi-même comme un objet, spontanément. Même pour ces artistes un peu bohêmes, une frontière était tombée ; leur inconscient collectif avait été moulé dans le capitalisme le plus féroce. Normal, puisqu’ils n’avaient jamais rien connu d’autres. Il repensait au Meilleur des Mondes : chacune appartient à tous les autres… Voilà on y était ! Chacun appartenait aux riches, seule différence… » Une écriture simple mais habile, un ton fringant, vif et non dénué de profondeur ni de perspicacité, allégé parfois par un humour souvent savoureux : « Agressifs, petits et puants, purs et vils produits de la consommation de masse, ces faciès patibulaires ainsi représentés avaient renforcé sa colère et dissipé toute dernière trace d’hésitation. » Chaque chapitre commence par indiquer le jour et l’heure, ou seulement l’heure. Nous sommes donc très au fait du lieu, du temps passé… et d’un quotidien qui va s’infiltrer. L’histoire n’est pas limpide, le crime non plus. Des personnages apparaissent qui pourraient avoir un intérêt à la disparition de cette jeune fille. Les premiers indices seraient-ils alors une mise en scène ? Ce roman attrape le lecteur en le faisant circuler dans le milieu de l’art et de la création, mais pas seulement. Il lui montre que l’on peut jouer, ou être victime des apparences, des ambiguïtés, de tout ce qui peut émaner de cette société faite de bien de strates. Anne-Marie Boisson (11/03/20) |
Sommaire Noir & polar Le lamantin 262 pages - 18 €
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