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Estelle-Sarah BULLE


Les fantômes d’Issa


« Les cauchemars sont encore revenus. Ça fait quatre ans maintenant que j'en ai presque toutes les nuits. Peut-être que ce journal va me soulager. Peut-être qu'écrire la grosse bêtise que j'ai faite la fera diminuer un peu dans ma tête. »

Ainsi commence ce livre, ou plutôt ce journal écrit par Issa, maintenant collégienne, qui veut affronter les démons qui la hantent depuis quatre ans, depuis cette année de CE2 où elle a commis cette « grosse bêtise » qui a bouleversé sa vie et donné naissance à des cauchemars qui perturbent toutes ses nuits.

Son secret, elle n’a jamais pu en parler à personne et surtout pas à ses parents qui en seraient morts de honte. Alors pourquoi maintenant ?
« Je me décide à écrire parce que, depuis quelques mois, j’ai une véritable amie. Elle s’appelle Charline. Elle ne connaît pas mon secret, mais, si je devais le confier à quelqu’un, ce serait à elle. »

Vivant depuis quatre ans dans une bulle de culpabilité et de souffrance qui l’isolait des autres, Issa n’avait pas d’amis et parlait le moins possible. Jusqu’à ce que Charline lui adresse la parole, un jour où elles se sont retrouvées toutes les deux, seules, sous le même abribus.
Charline c’est la « bad girl » du collège, une fille de treize ans qui fume en cachette et boit des bières avec des copains plus âgés. Elle traîne une réputation de « fille désaxée » mais pour Issa, elle est plutôt le symbole de la liberté. « On dirait une boule de soleil. Ça rayonne de sa personne. »

C’est une surprise pour Issa d’entendre Charline s’adresser à elle, ce jour-là, sous l’abribus.
« Toi, t’es pas une Renoi de Luzarches, je t’ai jamais vue en ville. »
Une fois l’étonnement surmonté, Issa explique qu’elle doit la couleur de sa peau à l’origine de ses parents tous deux venus de Mayotte, « une île perdue dans l’océan Indien » où elle n’est jamais allée et qu’elle vivait dans un petit village de la région avant d’emménager à Luzarches.
Charline lui a proposé de partager ses écouteurs et la musique de son smartphone. Une relation de confiance s’est installée entre elles. Elles se baladent ensemble et « se confient des trucs » sur leur vie ou leurs parents. Bien sûr, Issa n’a pas pu révéler son lourd secret, mais ces débuts de confidences lui donnent envie de raconter par écrit tout ce qu’elle s’efforce encore de dissimuler. Pour en faire quoi ? Aucune idée mais elle sent que ça va la soulager…

Un autre élément important va inciter Issa à affronter son passé, c’est son goût pour les mangas qu’elle a découverts au CDI et particulièrement ceux de Keïji Nemuro (n’ennuyez pas votre libraire, nous sommes dans une fiction !). « Ma passion pour Nemuro était née quand j’avais découvert son premier manga, un truc très sombre qui parlait d’un enfant ayant commis un crime affreux sans le vouloir. » Elle s’est sentie très concernée…

Issa va aussi rencontrer un ami de Charline, un garçon positif et toujours souriant qui joue d'un drôle d'instrument de musique, et retrouver un élève de sa classe de CE2 qu'elle détestait à l'époque.

L'écriture de toutes ces rencontres et le récit dans son journal de sa « grosse bêtise » lui permettent d'échapper par le haut à sa solitude et à sa culpabilité, à tous ces cauchemars et ces démons qui lui pourrissaient la vie depuis quatre ans.

Un roman émouvant où la narratrice parvient à exprimer ses souffrances pour mieux les dépasser, un roman qui pourra intéresser bien des lecteurs mais aussi peut-être en aider certains à trouver une voie pour se libérer d’émotions trop lourdes.

Serge Cabrol 
(14/02/20)    



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Jeunesse








Estelle-Sarah BULLE, Les fantômes d’Issa
L'école des loisirs

Médium
(Janvier 2020)
128 pages - 12,50 €










Estelle-Sarah Bulle

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