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Muriel BARBERY


Une rose seule


Rose est au Japon car son père, Haru, qu’elle n’a jamais rencontré, vient de mourir et de lui laisser une lettre. Elle arrive à Kyōto pour voir ce qu’il y a dans son testament et ce séjour lui permet de découvrir qui était Haru, quelles sont les personnes qui l’entouraient, les lieux où il vivait... Elle n’a pas connu son père japonais car sa mère l’a quitté juste après sa naissance et avait demandé à Haru Ueno de ne jamais voir sa fille, demande qu’il a respectée. Sa mère et sa grand-mère sont mortes ainsi que ce père inconnu. Seule face à un grand vide, elle découvre l’environnement de l’histoire et de la sagesse japonaises.

Alternent de courts chapitres, sur l’histoire et les dynasties anciennes, qui présentent différentes façons de voir le monde, avec des chapitres sur le présent de Rose. Une phrase de chaque petit chapitre du passé sert de titre de chapitre pour la période actuelle sous forme d’une pensée qui nous permet de réfléchir sur le sens de la vie, ce que fait Rose en permanence dans cet univers qu’elle découvre : « J’ai attendu longtemps dans le dénuement, à présent la fleur de prunier est en moi. » La nature, les fleurs, les arbres, le vent, la pluie jouent un rôle essentiel, ce qui touche Rose qui est botaniste.

Peu après son arrivée, un homme se présente à elle.
« – Je m'appelle Paul, dit-il. J'étais l'assistant de votre père. Comme elle ne disait rien, il ajouta :
– Peut-être ne savez-vous pas qu'il était marchand d'art ?
Elle fit non de la tête.
– Marchand d'art contemporain.
[...]
– Vous étiez amis ? demanda-t-elle.
Il hésita.
– Il a été mon mentor mais à la fin, oui, on peut dire que nous étions amis. »

Paul accompagne Rose, ce qui crée un lien entre eux et, grâce à lui, elle découvre l’homme qu’était son père puisqu’il l’emmène visiter des temples et des jardins en suivant un parcours établi par Haru avant sa mort.

La complexité de Rose s’entremêle avec celle du Japon. Elle tente de donner sens aux vides et aux zones d’ombres comme elle le fait pour comprendre une peinture japonaise où le vide joue un rôle primordial.

« À l'époque des samouraïs, sur l'île de Sado, en mer du Japon, vivait un ermite qui, du matin au soir, regardait l'horizon. Il avait fait vœu de consacrer sa vie à cette contemplation, de s'y absorber tout entier, de connaître l'ivresse de n'être plus qu'une ligne entre la mer et le ciel. Cependant, comme il se plaçait toujours derrière un pin qui empêchait qu'il eût une vue dégagée, on lui en demandait la raison et il répondait : Parce que je ne crains rien tant que de réussir. »

Ce roman donne l’impression de pénétrer dans un jardin zen et le vent des jardins frôle notre peau comme les mots animent nos émotions. Le rythme de l’écriture est tout en harmonie avec nos pas dans Kyōto.
C’est un très beau voyage dans le temps et l’espace japonais.

Brigitte Aubonnet 
(01/10/20)    



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Actes Sud

(Août 2020)
160 pages - 17,50 €




Muriel Barbery,

née en 1969, a publié
cinq romans et obtenu plusieurs prix littéraires. L’Élégance du hérisson a été adapté au cinéma avec Josiane Balasko.



Quelques mots sur son premier roman dans notre dossier sur la gourmandise :