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Arthur TERRIER

Chercher Kinski



Avant d'entendre parler de Kinski, le narrateur avait « de terribles préoccupations ». « Ces préoccupations avaient pour directe conséquence d'alourdir mon âme et de bêtifier mon esprit. […] Ces préoccupations avaient accaparé l'intégralité de mon être, j'étais comme marionnettisé par ces préoccupations et quiconque m'aurait rencontré à ce moment-là, ne m'aurait pas rencontré moi, mais plutôt un pastiche de moi, une vulgaire marionnette. » Se sentant marionnette, il décide de se détruire, de nier tout ce qui le faisait. « J'ai considéré ma mémoire et les trésors qu'elle contient, et je les ai regardés sans aucune forme de compassion, pour tout de suite les nier, puis j'ai entrepris de nier tous mes souvenirs personnels et toutes mes expériences, puis j'ai réfuté toutes mes déductions, réfuté l’avis que j'avais sur les gens... » Pour finalement arriver à « j'étais vide » en quelque sorte propre pour un nouveau départ.

Le narrateur va fuir Paris (comme Kinski) et s'établir à Brixton à côté de Londres. « C'est par téléphone que mon ami Hugo m'a révélé la présence de Kinski à Brixton. Kinski était à Brixton et moi je l'ignorais et ne l'apprendrais que plus tard au téléphone par mon ami Hugo. Avant d'avoir mon ami Hugo au téléphone j'étais occupé à tout autre chose, et certainement pas occupé à chercher Kinski. » Dès lors, il se met à chercher Kinski. "Chercher", titre de la première partie, est un mot qui se répète, cher-cher et le texte fonctionne beaucoup sur la répétition, comme vous l'avez remarqué dans la dernière citation, créant une musique sérielle. "Chercher", du latin circare, aller autour, c'est aussi ce que fait le narrateur, tourner en rond dans Brixton à la recherche de l'Écrivain, de Kinski figure drôle d'un professionnel de l'écriture. En fait, il ne tourne pas en rond, il suit une spirale qui irait vers un centre, une spirale qui serait une véritable formation professionnelle, une spirale qui passe par la lecture, puis la phrase, la pensée, pour arriver au centre de l'écriture, le véritable être du narrateur.

Cette autofiction, selon la quatrième de couverture, est donc une sorte de mise en abyme du personnage narrateur qui va devenir écrivain. Si bien que nous avons des remarques fines de « vrai lecteur » quand le narrateur se met à lire plein de romans, particulièrement du XIXe siècle, ainsi en exemple Le Père Goriot : « Je me suis dit que Balzac n'avait pas assumé de faire un livre sur la mort et entièrement sur la mort, c'est-à-dire entièrement centré sur le Père Goriot », sur le schéma narratif, sur la Phrase, « J'avais la certitude que la phrase était l'essence de l'écriture », ou encore sur la Pensée : « Moi je voyais la pensée comme une rengaine ». Une autofiction pleine d'intertextualité.

Un premier roman qui se lit comme un polar plein d'humour, où le narrateur après avoir nié le pastiche de lui-même arrive à la véritable écriture de son être. Un premier roman comme une « rengaine » que vous aimez lire, aimez ouîr.

Michel Lansade 
(09/10/19)    



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Arthur TERRIER, Chercher Kinski
Conspiration

(Septembre 2019)
160 pages – 20 €