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Guillaume GUÉRAUD


Captain Mexico


L’action se déroule au Mexique à Matamoros un village près du Rio Grande qui fait frontière avec les États-Unis. Le jeune Paco, onze ans, est fasciné par la révolution et plus particulièrement par Emiliano Zapata dont il a fait son héros. Chaque jour il rejoue avec ses copains la révolution zapatiste sur le parking devant l’école. Mais Esperanza dont il est amoureux n’admire que les super-héros américains.
« Emiliano Zapata ne craint pas les balles ! se vanta Paco.
Esperanza ricana : tu confonds Zapata avec Spider-Man ou Superman. [...] Je te rappelle que dans la réalité, Zapata a été assassiné [...] Votre guerre est dépassée, ajouta-t-elle. Réveillez-vous les gars on est au XXIe siècle !
Paco [...] bomba le torse pour aboyer tel un vrai révolutionnaire : Et alors ? La misère n’est pas plus agréable aujourd’hui ! »
Autour d’eux en effet il n’y a que les cabanes en tôle du bidonville, les carcasses de voitures, l’air pollué par les fumées de l’usine américaine Holy Plast, la faim et cette frontière qui paraît plus infranchissable encore depuis l’élection de Donald Trompette. Et comme son héros, Paco rêve de mettre fin à la misère dans son petit village et de faire justice.
Son père ouvrier au salaire réduit et aux horaires allongés dans l’usine de jouets locale dont le siège social est américain a déjà tenté sans succès, comme beaucoup de ses voisins, d’émigrer de l’autre côté du fleuve. Depuis que sa femme s’est fait virer de l’usine à sa dernière grossesse la vie est devenue encore plus difficile. Alors épuisé et découragé, l’homme ne voit pas d’autre solution que celle d’une nouvelle tentative d’exil pour subvenir aux besoins des siens. Sa femme préférerait  que tous se battent pour obtenir un travail digne et de quoi vivre sur place. Paco lui rêve de révolution.

Aussi, quand un sombrero tombe du ciel devant lui et que dans les minutes suivantes il parvient,  sans qu’il n’y comprenne rien, à mettre en déroute l’adolescent qui terrorise, cogne et rackette tout le quartier, le garçon hésite encore à y croire. Mais après de nombreux essais il se laisse aller à sa joie : le sombrero miteux lui donne vraiment des pouvoirs extraordinaires. Le voilà dorénavant doté d’invulnérabilité, d’une force et d’un souffle super puissants,  de crachats- grenades, de rayons de feu qui paralysent l’ennemi, de lasers pour tout découper et d’autres qui désintègrent dans un feu d’artifice,  bref de tout un attirail de combat qui va enfin lui permettre, comme son idole, de protéger les siens et de faire justice. À cela s’ajoutent de nouvelles fonctions comme le vol, les sauts extraordinaires, l’invisibilité et la rapidité de fusée qui devraient bien l’aider une fois qu’il les maîtrisera mieux.
Mais quand, le soir même, le père d’Esperanza, agitateur syndical connu des services de police,
se fait arrêter pour avoir initié et organisé une grève à l’usine de jouets pour le lendemain, Paco n’hésite pas à se porter incognito à son secours. Cette nuit-là, grâce au super-héros, ce seront tous les prisonniers politiques qui d’un coup retrouveront la liberté.  La légende du justicier qui dit se nommer « Captain Mexico » est née. 

« Paco testa de nouveaux pouvoirs au fur et à mesure : "Sauts en ricochet", "pieds rebondissants", "bras tentacules", "doigts serpents venimeux", "projecteur de flocons frigorifiants", "étincelles aveuglantes", "nuage puant"... Ces efforts d’imagination le divertissaient mais, pour forcer les portes des usines, stopper les machines, virer les patrons et désarmer les flics, les plus efficaces restaient "laser explosif" et "rayon paralysant". »
Le lendemain, pour la grève et le blocage, tous l’attendaient pour neutraliser la police, mettre à genoux le patron en place et faire triompher leurs revendications…
Dans les chapitres suivants d’autres batailles, toujours dans son village et en lien avec le monde du travail, feront suite dans une stupéfiante escalade de moyens avec comme adversaires l’armée mexicaine puis l’US Air Force et enfin Super Big Bos, le plus fort des super-héros américains mandaté par Donald Trompette lui-même pour mater la révolte collective et terrasser le courageux Captain Mexico, cet empêcheur d’exploiter à fond qui défie l’autorité et le monde des affaires.  

Il est rare de trouver dans un roman pour cette tranche d’âge un tel mélange de réalisme social et de magie. Guillaume Guéraud, dans ce vrai « film » d’action qui se termine par une grande fête après avoir chassé les méchants et rendu leur usine aux travailleurs, invente pour le faire une combinaison efficace et parfaitement ludique. Les enfants vont adorer cet univers passablement mouvementé et déjanté de super-héros truffé d’effets spéciaux et de gags tout en découvrant à travers cette épopée mexicaine, un pays, les dessous de l’émigration économique et du monde du travail, la notion de révolution et enfin l’odieux Donald Trompette au pouvoir, dont ils ont déjà vaguement entendu parler par les médias  ou par les conversations entre adultes.

Avec sa typographie aérée, ses vignettes et illustrations au trait de Renaud Farace, son rythme endiablé et sa bonne humeur, il permet aux enfants une immersion totale et immédiate et pourrait séduire même ceux qui pensaient ne pas aimer lire. 

Toujours aussi original et performant, en fin connaisseur de la tranche d’âge  (8-11 ans) à laquelle il s’adresse, Guillaume Guéraud nous propose avec Captain Mexico un roman cinématographique vif, drôle et engagé qui les enchantera à coup sûr et pourrait en bonus ouvrir leur regard sur certaines actualités. Viva Zapata et Captain Mexico !     

Dominique Baillon-Lalande 
(02/08/18)    



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Jeunesse







Le Rouergue

Collection dacodac
(Mai 2018)
128 pages - 8,80 €















Guillaume Guéraud,
né à Bordeaux en 1972,
est l'auteur d'une quarantaine de livres, surtout pour la jeunesse.



Bio-bibliographie sur
Wikipédia







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