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Pascal THIRIET
Un ministre a été invité pour fêter les cinquante-cinq ans d’Hercule du Tylleux. « Il faut dire qu’il représente deux ans de travail et d’intrigues, ce ministre. Deux ans de transactions avec l’UMP et donc, aussi, beaucoup d’argent. Chez les du Tylleux, l’anniversaire du chef de famille, c’est la grosse affaire. » Le banquier richissime, Hercule du Tylleux a deux fils, Dante et Aymé. Une femme, bien sûr, une maîtresse, évidemment, une étroite collaboratrice, etc. La femme d’Hercule : Marie-B., troisième fortune de France, mariée par obligation mondaine et familiale s’autorise parfois à lancer quelque vérité à son mari : « – Le jeu ? Faire se haïr vos fils est un jeu ? Si vous manquez à ce point de distractions, pourquoi n’allez-vous pas tuer des tigres au Bengale comme tout le monde ? » Leurs fils : Dante, l’aîné, cynique, semblerait être le digne héritier de son père. « Le pétrole le moins cher du monde c’est le pétrole volé, et du pétrole volé, Dieu soit loué, il y en a plein. En Syrie, en Irak, en Libye, des citernes géantes pleines à ras bord. En Lybie, les terminaux sont intacts, il n’y a qu’à venir s’amarrer et pomper. En Syrie, il ne faut pas ennuyer les Turcs, mais on peut s’arranger : il y en a pour tout le monde et la Syrie c’est à côté de l’Irak. Voilà pour les achats. Aymé, le préféré de sa mère, homosexuel, nous étonnera peut-être en montrant quelques qualités humaines sympathiques (attention, tout de même, le pluriel pourrait être un peu exagéré !) Certains des personnages qui gravitent autour de cette famille ne seront pas aussi caricaturaux qu’il y paraît à première vue, c’est du moins ce que nous nous apprêtons à imaginer… Et puis le sexe, toujours, comme divertissement, saupoudré de sentiments, mais surtout moyen de pression ou assouvissement de rancunes. Parfois avec des conséquences plus que douteuses. Cela ne nous surprend pas et renforcerait plutôt, la noirceur de l’encre de notre auteur : « Elle ne dit pas qu’elle s’en fout du rejeton d’Agnès de Saint-Suaire et de Dante du Tylleux. Sans compter que rejeton du Tylleux c’est sûr, mais de Dante, nettement moins. Il y en a plus d’un qui se souvient que la Saint-Suaire avait traîné dans les beaux draps d’Hercule avant d’épouser le fils. Le Gonzague baladait sa tronche de du Tylleux de pension suisse en cure de désintoxication. Pour l’anniversaire de son peut-être-pas-si-grand-père-que- ça, on l’avait collé avec un infirmier dans un avion privé avec une petite mallette de médicaments et un billet de retour pour sa cure. » Ainsi pense Blasphème. La violence aussi, sourde ou bruyante. Banalisée. Or, le suspense nous tient, la curiosité opère, l’envie de savoir comment tout cela va se terminer, comme si nous nous passionnions vraiment pour ces enchevêtrements de fric plus ou moins sale, et ces états d’âme au ras du sol… Est-ce parce que nous ne connaissons pas vraiment les dessous de la grande finance que cette vision du monde nous paraît déjantée ? Et que ce roman, au demeurant brillant exercice de style, montrerait de manière percutante qu’il n’y aurait pas de fiction-fumée sans feu… ou l’inverse ? Et l’humour ! Cette arme si efficace que Pascal Thiriet maîtrise parfaitement : il dégaine vite et à bon escient ! Anne-Marie Boisson (05/09/15) |
Sommaire Noir & polar Éditions Jigal (Mai 2015) 240 pages - 18,50 € Pascal Thiriet Bio-bibliographie sur le site Jigal Découvrir sur notre site un autre roman du même auteur : Faut que tu viennes |
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