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François BLISTÈNE
Le passé imposé
Philippe Pontagnier, orphelin de parents aisés et bons vivants, choisit
la retraite, l'ascèse et la tyrannie. Il prend femme, qu'il enferme avec
lui dans sa maison-forteresse. Trois enfants naissent : Marguerite, Vincent et
Laure. Ils sont séquestrés par leur père, ne savent rien
du monde extérieur, de la vie moderne. Des années plus tard, un
vieux précepteur étrange et bienveillant est embauché, reclus
volontaire. Les enfants grandissent, instruits mais ignorants, solidaires dans
leur solitude. Naïfs et candides.
François Blistène nous offre un conte de fées en trois actes.
La première partie du roman est à la fois suffocante et légère
: tandis que le lecteur est pris dans l'enfermement, les enfants s'accommodent d'une
situation qui ne peut leur paraître étrange puisqu'ils n'en connaissent
pas d'autres. C'est le règne de l'ogre. Puis les enfants s'échappent
de la forteresse, à la post-adolescence, et découvrent Paris, éblouis.
Fuite merveilleuse, sans problème d'argent, sans méchante rencontre.
Ils sont débrouillards et autonomes, ils ont tout appris dans les livres.
La bonne fée apparaît alors, sous les traits d'un illusionniste attachant
qui leur enseigne les ficelles de son art. Passent les années, heureuses,
différenciées pour les uns et les autres : Marguerite et Vincent
d'un côté, la benjamine Laure prenant son indépendance de
femme libre.
Au troisième acte, l'ogre retrouve ses enfants
Le passé imposé est un roman étrange et prenant. Il
évite tous les pièges du désastre psychologique annoncé,
du récit délétère de l'enfance martyre. François
Blistène suggère le merveilleux, donne vie et pensée aux
choses et aux lieux. La maison-forteresse, par exemple, est douée d'une
vie propre, vibrant au rythme de la folie de son propriétaire ou des événements
inattendus : « La maison, qui souffrait de solitude, fit un excellent
accueil aux deux arrivants, réjouie du mouvement qui allait réveiller
ses articulations engourdies serrures rouillées, volets tremblants,
tuiles dégarnies, murs hydropiques, parc à la végétation
emmêlée ». L'illusionniste, nommé Mystère,
est une figure protectrice dans un Paris sans danger, bénéfique
et magique. C'est Gustave Moreau la petite Laure passe des heures dans
le musée consacré au peintre symboliste qui peint la toile
de fond de ce conte étonnant et réussi.
Christine Bini
(28/04/14)
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Lectures
Éditions du Sonneur
(Mars 2014)
260 pages - 16 €
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