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Une "banlieue tranquille". La vie quotidienne. Des gens ordinaires… mais qui vont être confrontés à une situation qui ne l’est pas… Le premier chapitre nous présente Joachim Fallet, un jeune toxicomane en proie au manque : « Déjà les crampes reprennent du service, expertes, grinçantes, de ces contractions qui s’annoncent, conscientes que les préludes de la souffrance sont presque pires que la douleur elle-même. » Sans argent pour acheter une dose, il va décider en désespoir de cause, de braquer une supérette : « Peu de fréquentation. Emplacement idéal. » Et très vite : « Tous à terre ! Le premier qui bouge, je le bute ! » Les chapitres suivants vont nous parler des personnages avant leur entrée dans la superette. Chaque titre de chapitre porte le nom d’un ou deux protagonistes. Nous pourrions supposer que la peinture, à la fois minutieuse et réaliste des états d’âme et situations des protagonistes, est justement là pour nous amener à comprendre leurs futures réactions au cours du braquage... Or ce n’est pas le cas ! Notre intuition est vite déroutée, nous allons de surprises en étonnements, et de respirations lentes en souffles bloqués. Pour devenir des témoins impuissants. Des consciences qui se soulèvent et retombent… Et ce qui est montré "in situ" met alors le lecteur encore plus au cœur de l’évènement. Peut-on alors se sentir soulagé en se disant qu’il s’agit bien là d’un roman et que la bascule qui se produit au cours de cette narration, en montrant comment les rôles peuvent se redistribuer, est bien toujours de la fiction ? Et que la réalité serait probablement tout autre ? Le style est vif, direct, cru parfois. Car Barbara Abel, sait très bien respecter le langage de chacun. « Et ça l’ennuie Germaine, quand ça devient grave. Ça l’agace. Elle est trop vieille pour ce genre de conneries. Elle n’a plus la patience. Elle a mieux à faire que de s’emmerder avec les problèmes relationnels de la famille Jeanratepazune, comme elle les a rebaptisés, un jeune crétin qui se prend pour le roi du monde et une mère complètement investie dans un rôle qui la dépasse. L’éducation, c’est comme les étiquettes sur les produits alimentaires : il y a une date de péremption. Passé cette date, ça ne sent pas bon. » Des rancœurs déjà à l’œuvre, des pulsions qui se libèrent. Une parole entraîne un acte qui en déclenche d’autres, les niveaux montent et rien ne semble être maîtrisé. L’auteure structure son roman de cette habile façon qui nous fait penser au théâtre. Après l’exposition, et la scène du braquage, viendra une troisième partie avec quelques nouveaux personnages… Un fait divers vécu et commenté de l’intérieur, mais où perce la finesse dans une écriture percutante. La pertinence du roman est là : dans cette complexité des actes dont la violence peut parfois être maladroite, comme dans la banalité des émotions. Avec un suspense à plusieurs variables. Alors, dans ce ciel couvert, où la lâcheté et la violence ordinaires semblent être à la portée de "tout un chacun", si nous cherchions quelques "trous" qui, à travers ces nuages noirs, laisseraient filtrer l’espoir ? Nous nous rapprocherions alors de cet accent particulier que Barbara Abel a laissé diffuser… et qui est l’accent du talent… Anne-Marie Boisson (30/06/15) |
Sommaire Noir & polar ![]() Belfond (Mai 2015) 336 pages - 18,50 €
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