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Michel LAMBERT

Dieu s'amuse



Le temps est passé mais il n'efface pas la rancœur et la douleur. Un homme marche avec sa mère qui perd la mémoire mais lui se souvient : "Autrefois, personne n'aimait ma mère. Et ma mère n'aimait personne." Les souvenirs de ses parents, de leurs disputes remontent à la surface. Les peurs de l'enfance envahissent sa vie d'adulte. Une femme vient de le quitter : "Je l'étouffais, paraît-il. Je les étouffais toutes. J'avais tellement peur de les perdre.
Comme autrefois, j'avais eu peur de perdre ma mère. Les jours de dispute avec mon père, elle quittait la maison en pleurs, menaçant de ne jamais revenir, et il me fallait courir dans la rue pour la rattraper, la supplier.
Non, ne pars pas ! Ne pars pas!
Tout ce cinéma.
"

Dans le recueil de Michel Lambert les hommes se cherchent. Ils s'interrogent, reviennent sur leur parcours de vie et la vie, ses douleurs et ses hontes reviennent à leur rencontre.

Cyril, dans Le jour du Rat mort, va voir ses deux sœurs pour leur faire une demande douloureuse. Que peut être la réussite si l'on n'est pas reconnu par ceux que l'on aime ?
Dans Un rêve, la passion amoureuse n'a qu'un temps, ensuite c'est celui de l'éloignement.
Prendre quelqu'un en voiture peut être soulant de paroles. De jeunes hommes sont en route pour participer à un cross dans la neige. Ils emmènent un homme qui leur parle sans cesse d'André qui courait lui aussi. Il devient vite envahissant.
Charlie reçoit un appel téléphonique à 2h du matin. Il attendait des nouvelles car Lili est en train de mourir. Mais c'est Manon, une ancienne maîtresse. Elle est avec un ami en bas de chez lui. Ils veulent le revoir. Pourquoi ? L'inquiétude gagne peu à peu Charlie. Peut-on échapper à son passé ? Manon lui reproche de l'avoir quittée pour Lili…
Deux passants se croisent, se regardent. Ils se connaissent, l'un est parti avec la femme de l'autre, trente ans plus tôt, mais il vient d'être quitté : "Bien sûr que ce n'était pas un passant comme les autres. C'était même le passant capital. Le passant de ma vie. Dieu s'amuse ? Oui, à sa façon. Il invente des jeux où l'ordre importe peu, où toutes les combinaisons sont possibles. Où chacun empile situations et émotions comme il veut, comme il peut, selon les circonstances. L'important, c'est que ça tienne debout.
Depuis un bon moment, il se taisait.
Moi de même.
"
Antoine, journaliste, est reçu par son directeur chez lui. Il découvre un tableau réalisé par la femme qu'il aime. Cela le déstabilise car il se demande comment le tableau a pu arriver dans cette pièce : "Était-ce pour elle que le directeur de la rédaction avait acquis cette œuvre ? De la même manière que lui-même l'avait offerte à la femme avec qui, pendant des années, il avait vécu une passion hérissée de drames, où tout semblait à chaque fois fini, cassé, irréparable. Mais le lendemain, ou une semaine, un mois plus tard, sur ces décombres s'édifiait un bonheur en apparence plus solide, plus beau, plus grand." Il échange des regards avec la femme du patron tout en se posant mille questions.
Un homme suit un homme alcoolique. Est-ce son double ? Il a ponctué sa vie d'actes de méchanceté. Il a eu aussi une mère très dure avec lui. Il a été odieux avec sa femme et son fils et se reproche beaucoup de ses comportements.
Hugo veut se suicider comme la femme qu'il a aimée.

Nous voguons d'une nouvelle à l'autre et les regards, les liens tissés dans le passé, l'intrication des différentes périodes de la vie, les relations familiales, amoureuses et amicales jouent un rôle essentiel. Le passé pervertit souvent le présent. Des retrouvailles, des rencontres, de la haine, des ressentiments, de la passion expriment la complexité des relations et des sentiments humains. L'amour des parents a souvent manqué et marqué au fer rouge certains des personnages de ces nouvelles. Le besoin d'analyser, de regarder, de suivre quelqu'un dans l'espoir de se trouver soi-même les conduisent dans des introspections où nous retrouvons l'écriture tout en délicatesse de Michel Lambert pour peindre ces hommes, créer des ambiances et parfois nous laisser en suspens pour permettre à chacun de continuer à imaginer la suite des parcours et s'interroger soi-même sur la complexité de la vie.

Brigitte Aubonnet 
(05/07/11)    



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Lectures









Editions Pierre
Guillaume de Roux

(Avril 2011)
192 pages - 16 €



Espace Nord

(Avril 2015)
192 pages - 8 €







Michel Lambert,
anime des ateliers d'écriture, notamment en centre de santé mentale. Fondateur et organisateur du Prix Renaissance de la Nouvelle, il a déjà publié une dizaine de livres qui ont obtenu plusieurs prix.





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