Photo © Eric Charbeau

Après la répétition

de
Ingmar Bergman




La rubrique des MONTREURS D’OURS concerne surtout le théâtre contemporain et évoque nos seuls coups de cœur. En revanche elle ne dit jamais nos déceptions lors d’un spectacle raté. De plus, nous regrettons très sincèrement quand une pièce de bonne qualité échappe à l’œil qui écoute ce qui, évidemment, nous arrive. Ce ne sera pas le cas pour l’amère comédie d’IIngmar Bergman, Après la répétition, qui promet une fin d’année brillante au Théâtre de l’Athénée.

Voilà une heureuse conjonction entre un texte de haut niveau et des comédiens de qualité. Laissant le talent s’exprimer et l’émotion se libérer sans les regrettables précautions du "consensus trop mou" et du "renvoi d’ascenseur trop répandu", le metteur en scène Laurent LAFFARGUE a su y capter le message de BERGMAN qui dit sans emphase superfétatoire la difficulté de vieillir en aimant (ou d’aimer en vieillissant) dans le domaine vibratile du spectacle vivant. Et peut-être, dans celui de la création ?

Il lui sera pardonné ce nombrilisme d’homme de scène car, sa plume aidant et son humour pratiquant un acidulé plus acide que bonbon sucré pour les choses de la vie, Ingmar Bergman nous propose un naufrage final, annoncé certes… mais maîtrisé. Et, faute d’en pleurer à pleins mouchoirs comme certains romantiques devant un camaïeu de feuilles d’automne ou d’en pleurer le mal de vivre à l’époque des couches-culottes, il nous le dit avec beaucoup d’allure.

Il vaut sans doute mieux terminer le parcours en souriant avec, en fond de scène, un désespoir classieux, sorte de dignité devant l’irréparable.

Pratiquant une répétition de ses errances sentimentales dans la vie privée, Bergman ne se privait pas de pratiquer belote et rebelote après ses répétitions d’homme de théâtre. Voire mieux, car la charge émotionnelle des plateaux est génératrice de ces étonnants coups de cœur. Et quand son dernier amour se précise pour une superbe jeune actrice dont il a aimé la mère, son renoncement prend des accents dont Racine aurait sans doute tiré des alexandrins déchirants.

Dans ce domaine de la nostalgie distanciée, Ingmar Bergman est un maître incontestable. Et sur le plateau tournant de l’Athénée qui rythme à sa manière la Ronde des Amours, Didier BESACE, Fanny COTTENÇON et Céline SALLETTE expriment l’ambiguïté de la situation avec une efficacité qui touche au plus profond. Si vous n’avez pas de projet mobilisateur pour cette fin d’année, je vous suggère de téléphoner pour retenir des places à ce spectacle de qualité. Elles vont se faire rares..

Claude Chanaud 
(22/11/08)    



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Montreurs d'ours









Athénée Théâtre
Louis-Jouvet


Direction
Patrice Martinet

Sq. de l'Opéra Louis-Jouvet
7 rue Boudreau
75009 Paris

Location :
01 53 05 19 19


Mise en scène
Laurent Laffargue

Avec
Didier Bezace
Fanny Cottençon
Céline Sallette

Traduction
Lucie Albertini
Carl Gustaf Bjurstrõm

Assistante
à la mise en scène
Sonia Millot

Scénographie
Philippe Casaban
Eric Charbeau

Lumières
Patrice Trottier

Costumes
Sarah Mériaux