La contrebasse


de Patrick Süskind



La contrebasse est une compagne comme une autre


Au théâtre de Poche Montparnasse, "La contrebasse" de Patrick Süskind prend le relais de récentes créations très mobilisatrices. Sur une mise en scène d'Elizabeth Vitali, le comédien Stéphane Bierry y incarne le héros solitaire que son instrument de musique accompagne dans tous les instants de la vie. Pour le meilleur et pour le pire.

Drame de la solitude, angoisse d'interprète des grands musiciens ou fiction chahutée d'un sensible que l'alcool rend bavard, il y a tout cela dans le personnage qui, tour à tour, rit de lui, pleure des autres puis se met en valeur ostensiblement avant de sombrer dans l'inévitable modestie de son destin dans un orchestre néanmoins national.

La connotation "dérisionnelle" n'est très jamais éloignée quand ce musicien (jouant l'artiste virtuose un peu blasé) se ressert un verre de plus. Mais l'émotion passe la rampe quand il pouffe sur son destin de contrebassiste effacé alors que le chef d'orchestre et le premier violon monopolisent les compliments des unes et les applaudissements des autres. Alors il échange avec son instrument des confidences de tous ordres dont la musique n'est jamais absente. Il aime sa contrebasse. Ensuite, il la hait. Elle prend de la place. Pourtant, elle n'est même pas un meuble. Alors que le piano… oui ! ! !

De plus, les formes de la contrebasse sont évocatrices des hanches de ces femmes qui demeurent pourtant absentes de son univers habituel, y compris si elles ne sont pas absentes de ses pensées. Voilà qui alimente heureusement son imaginaire où les boissons et la "soprano" ont chacune leur place.

Enfin, l'alternance des textes et des extraits de symphonies ou de concertos donne à la pièce de Süskind une densité originale et, sans aucun doute, elle élève le débat intérieur du contrebassiste à un haut niveau de connivence avec le public. Chacun y trouve son compte.

C'est dire que le texte touche et que la musique accompagnatrice participe de cette émotion. Au milieu de tout cela, vous assisterez à un numéro où la gestuelle débridée de Stéphane Bierry accompagne avec bonheur le rythme de la musique. Et là, le rire jaillit.

Arrive l'heure où le contrebassiste revêt l'habit de cérémonie, arbore le nœud papillon bleu noir sur fond de chemise blanche, puis prend un dernier verre avant d'aller jouer "L'or du Rhin". Derrière lui, Mozart, Beethoven et tous les autres arrivent en rangs serrés... Les spectateurs sont heureux.

Claude Chanaud 
(08/06/08)    



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Montreurs d'ours






Théâtre de Poche Montparnasse

75, bd du Montparnasse
75006 Paris

Location :
01 45 48 92 97



Mise en scène :
Elizabeth Vitali


avec :

Stéphane Bierry










Patrick Süskind
La contrebasse

Fayard, 1989
et
Livre de poche