Les riches reprennent confiance


de Louis-Charles Sirjacq







« Tout pour le profit en partant des désirs des consommateurs » disait-on dans les années soixante quand la France découvrait les techniques américaines de marketing concernant la fabrication et la diffusion les produits de grande consommation. Cependant Bruno SABIN – un affairiste de cette époque – n'avait sans doute lu que la première partie de l'aphorisme puisqu'il appliquait dans ses affaires une philosophie du type glouton et parfaitement asociale se résumant à : « Tout pour le profit a condition de ne pas se faire prendre. »

Vous l'avez compris, le personnage principal de la comédie Les riches reprennent confiance est un exemplaire bien identifié de ces cyniques dont toutes les époques se déshonorent et que Louis-Charles SIRJACQ montre du doigt dans le sillage d'Octave MIRBEAU *.

Le cas particulier de Bruno SABIN mérite d'être sanctionné par tous les moyens efficaces dont le rire n'est effectivement pas le moindre. Le linguiste Alain REY a depuis longtemps souligné que le ridicule ne tue plus mais que le rire a pris sa place. Je le cite : « le rire tue "pour de rire" mais il combat, rabaisse et annule les nuisibles pour de vrai. »

Voilà pourquoi cette pièce mise en scène par Etienne BIERRY est à la fois virulente et jubilatoire. A la manière d'un pamphlet ponctué par des éclats de rire. Evidemment désapprobateurs et lucides.

La démesure du personnage qui veut tout – et tout de suite – est sans doute une caractéristique importante de l'affairiste qui perd tout sens commun après avoir perdu tout sens moral mais cette démesure peut être aussi son Waterloo. Dans ce rôle, le comédien Jacques FRANTZ va nous séduire au moins autant que son personnage va nous horrifier. Jusqu'à la chute.

Concernant cette excellente comédie où, suite à la boulimie de l'affairiste, une certaine morale arrive en forme de boomerang, on peut évoquer la pensée des anciens Grecs stigmatisant le fait de désirer en "démesure". Cela s'appelait HYBRIS. Et sous le nom de NEMESIS ces vieux sages athéniens annonçaient pour le glouton à caractère asocial, le châtiment des Dieux. Il avait pour effet de faire se rétracter l'individu à l'intérieur des limites qu'il a franchies.

En 2007, les dieux ont sacrément du plomb dans l'aile. Mais, au Théâtre de Poche, par la grâce de Louis-Charles SIRJACQ, d'Etienne BIERRY et de dix comédiens efficaces, le rire les remplace. Le spectateur a gagné au change.

Claude Chanaud 
(01/10/07)    


* Mirbeau avait effectivement décrit dans Les affaires sont les affaires le même type d'homme d'affaires, insensible aux autres, au milieu des tragédies qu'il a provoquées par son insatiable cupidité.



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Montreurs d'ours






Théâtre de Poche Montparnasse

75, bd du Montparnasse
75006 Paris

Location :
01 45 48 92 97



Mise en scène :
Etienne BIERRY


avec :


Jacques FRANTZ
et
Thomas LE DOUAREC
Marie PITON
Michèle BOURDET
Naidra AYADI
Marie PILLET
MAYANE
Maïté VAUCLIN
Marjorie FRANTZ
Christophe LAUBION






Le texte est publié
à L'avant-Scène
112 pages - 10 €