Festival d'Avignon©Christophe Raynaud de Lage



L'Avignon nouveau
est (presque...)
arrivé




Il y a effectivement du nouveau dans l'air avignonnais – voire dans l'aire de la vieille cité papale – car ce Festival annonce la mutation heureusement entamée de sa partie OFF. Traduisez "au-delà". En ce mois de juillet, plus de 950 spectacles étaient programmés chaque jour chez cet impertinent, assez distancié des circuits officiels. Mais, surtout, une véritable unité d'action a été réalisée entre les frères ennemis d'hier.

En effet, jusqu'en 2006, deux concurrents se disputaient les scènes, éditaient leur programme et chacun d'eux proposait aux amateurs sa propre carte d'adhérent. Le public qui ne comprenait pas grand chose à ce conflit gagne aujourd'hui en simplicité sur deux points essentiels. D'abord celui de l'information, ensuite celui des réservations. Maintenant on peut effectivement retenir sa place par un service en ligne qui couvre les 75 salles de spectacle de la Cité des Papes. D'autre part, les petites compagnies apprécient une baisse notable de leur cotisation, laquelle leur permet de trouver place sur le programme à meilleur coût.

Et tout ceci en attendant mieux puisque le gigantesque vivier d'Avignon fera l'objet à l'automne 2007 d'une vaste réunion incluant non seulement d'établir un bilan mais aussi de donner lieu à une nouvelle réflexion sur des perspectives, des ambitions et, cerise sur le gâteau, l'utilisation optimale des fonds publics.

En attendant ces Etats Généraux d'un OFF volontariste et unifié, un fonds d'action artistique a été créé et il a soutenu huit compagnies théâtrales que l'on a retrouvées avec d'autres dans une immense parade. L'événement n'est pas mince et nos vœux accompagnent ce grand chantier de création où les compagnies étrangères viennent de plus en plus nombreuses rejoindre les francophones.

Reste qu'une semaine passée à rechercher et à voir quatre spectacles journaliers donne un début d'analyse plus qu'une véritable synthèse de ce foisonnement de présences et d'engagements. Il apporte néanmoins des bonheurs de rencontre, des surprises heureuses ainsi que son lot contingent de déceptions dont je ne parlerai pas.

Dans cette rubrique, je vous indique simplement ceux que j'ai aimés parmi les spectacles que vous pouvez encore voir là-bas jusqu'au 28 juillet. Et peut être, plus près de chez vous au cours de la prochaine saison.

D'abord VIENNE 1913. Cette remarquable comédie dramatique d'Alain Didier-Weil est une intelligente analyse de la montée du nazisme sur fond d'antisémitisme. Bouleversant. Ensuite, j'ai été impressionné par RECEPTION de Serge Valleti. Claire Nebout et Jean-Claude Dreyfus y sont inquiétants avec un bonheur évident. Concernant ce dernier, sa démesure est géniale sans nuire pour autant au personnage ; on pense à certaines interprétations de Pierre Brasseur.

Dans un autre genre, plus classique, j'ai savouré le montage de LA VEUVE ET LE GRILLON par l'excellent Daniel Soulier en compagnie de la (trop) rare Frédérique Tirmont. Ce combat à fleuret moucheté entre Jean de La Fontaine et Madame de Sévigné est un régal pour l'œil et l'esprit. Puis, j'ai été ému en assistant à AIMER SA MERE par la compagnie Ailes. Et, dans JE VOUS SALUE MAMIE, Sophie Artur cultive une saine révolte ponctuée de nombreux rires. Recommandé à tous ceux dont les ancêtres pensaient détenir la vérité.

Egalement, vous pouvez voir avec un plaisir d'esthète LA DIVINE MISS V. avec Claire Nadeau au théâtre Le Petit Chien, ou revoir le mythe de Don Juan dans LA NUIT DE VALOGNE à la façon d'Eric-Emmanuel Schmitt. Vous pourrez enfin saluer Jacques Prévert dans PREVERT ET IMPREVUS et, pour les amis de la commune, retrouver Louise Michel, l'esprit frondeur et la chanson accompagnatrice dans RENDEZ-VOUS AU CHAT NOIR.

Je ne saurais terminer cette rubrique sans vous dire que j'ai également fréquenté le Théâtre IN, lequel n'hésite ni sur les (rares) idées nouvelles ni sur les cheminements d'une création souvent hermétique, mais je le ferai sous la forme d'une interrogation, plus étonnée que partisane. Je l'adresse ainsi aux responsables et aux animateurs de ces scènes officielles : QUELLES PENSEES VOUS AGITENT QUAND PLUSIEURS SPECTATEURS N'ATTENDENT PAS LA FIN DU SPECTACLE POUR QUITTER LA SALLE ?

Ce phénomène récurrent en 2007 fut observé (1) aux Pénitents Blancs, (2) au Palais des Papes, (3) à La Chartreuse de Villeneuve lez Avignon. Et corollaire nécessaire à la recherche d'une réponse bien argumentée : COMBIEN DE SPECTATEURS ONT ASSISTE A TOUTE LA REPRESENTATION PARCE QU'ILS N’ONT PAS OSE PARTIR AVANT LA FIN DE LA PIECE ?

Reste que le parrainage de RENE CHAR pour ce Festival est une heureuse décision pour nous rappeler la conjonction évidente de la poésie et de la résistance. Et sa nécessité qui perdure bien au-delà des années d'occupation.

Claude Chanaud 
(23/07/07)    



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Montreurs d'ours









Avignon 2007

sous le parrainage de
René Char (1907-1988)





Réception
avec
Claire Nebout
et
Jean-Claude Dreyfus






Prévert et imprévus







La nuit de Valogne