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Avignon 2013







J'évoque ci-dessous un moment du Festival d'Avignon de l'an 2013. Mon témoignage restera modeste car les potentiels de cette manifestation sont de plus en plus importants et les choix deviennent fort difficiles lorsqu'on y séjourne une petite semaine seulement.

J'ai vu avec plaisir Les lois de la gravité de Jean Teulé au théâtre de La Luna et L'or de Blaise Cendrars au Girasole, mais l'heureuse surprise d'une séduction totale fut pour moi L'importance d'être Wilde avec un éblouissant trio de comédiens au Théâtre du Balcon qui connaissent parfaitement l'œuvre d'Oscar Wilde ; également j'ai apprécié Velouté de Victor Haim au théâtre du Bourg Neuf ou une étonnante perversité au sein d'un couple de nantis. J'ai aussi beaucoup aimé le tonus d'une juvénile troupe italienne qui donna vie aux plus célèbres scènes de Dario Fo dans Mystère Bouffe et autres histoires. C'était dans la Cour de la Faculté des Sciences. Enfin, dans le domaine surabondant des "One Man Show" je vous confirme deux heureuses rencontres : A la Luna La lettre de et avec Paolo Nani et au Petit Louvre Le secret du Temps plié de et avec Gautier Fourcade ; ce furent deux approches originales dotées d'un rire intelligent. Je passe sous silence quelques comédies n'ajoutant qu'un modeste quantitatif à cette immense foire culturelle où l'on peut néanmoins glaner quelques pépites. Et je souligne mon regret d'une mise en scène à la tendance emphatique concernant la Conférence des Oiseaux de J.-C. Carrière car cette très poétique pièce mérite à mon sens un meilleur sort.

Le présent festival bat ses précédents records. A fin juillet, il aura dépassé de beaucoup le million de festivaliers qui auront vu plus de 30 000 représentations en trois semaines. A la façon des budgets des États, ces chiffres dépassent la capacité de conceptualisation d'une foule assoiffée de "Levers de rideaux" laquelle, par ailleurs, se plaint d'une organisation restée élémentaire ou devenue vétuste. En effet, si certaines petites salles sont effectivement d'un accès facile malgré leur inconfort, la plupart des spectacles connaissant le succès font passer le spectateur par une double contrainte consistant d'abord à retenir les places pat téléphone et ensuite, billets en mains, d'attendre une demi-heure sous le soleil. Voire plus !

Faut il encore que votre appel n'aboutisse pas à un message enregistré du type : Vous êtes en relation avec un répondeur téléphonique mais nous sommes indisponibles. Merci de renouveler votre appel ou de passer au théâtre de 10 heures à 13 heures et de 15 heures à 20 heures. Bernard Faivre d'Arcier qui a conduit les destinées du festival le confirme en précisant : Savoir patienter au téléphone sans casser ce dernier ni crier sa haine de la société de communication est un témoignage de résistance apprécié par la direction du Festival *. De là à évoquer l'époque heureuse où l'amateur n'était pas pris en otage par les marchands de ce nouveau temple, lequel est forcément bien éloigné de celui de Jean Vilar, il n'y a qu'un pas. Et certains mécontents le franchissent avec une détermination sur laquelle les animateurs de cette boîte de Pandore devraient se pencher sérieusement.

De plus, les amoureux des scènes avignonnaises ne se bornent pas à évoquer les désagréments d'une marchandisation outrancière dans le théâtre OFF. Elles se complètent de la réelle nostalgie d'un Palais des Papes où le théâtre IN nous a marqués longtemps de son meilleur lors de son extraordinaire épopée. Composée avec les témoignages de quatorze spectateurs concernant ces lieux mythiques, la pièce prétentieusement titrée Cours d'Honneur fut ma dernière soirée. A part deux petits rires et une émotion fugitive, ce spectacle ne fut guère qu'une navrante addition de lieux communs. Contrairement à ce qu'affirma le metteur en scène de cette insignifiance programmée spectacle expérimental, la place du spectateur est d'évidence dans un fauteuil situé dans la salle mais pas ailleurs tandis qu'Hamlet, Figaro et le Prince de Hombourg se doivent évidemment d'occuper les tréteaux.
C'est ainsi qu'en cet été 2013, l'innovation sur une des scènes les plus prestigieuses du monde consista à nous présenter les états d'âme de personnages qui n'étaient même pas en quête d'auteur.

Claude Chanaud 
(22/07/13)    


* "Bienvenue au Festival d'Avignon" ou "Abécédaire du spectateur" de Bernard Faivre d'Arcier (Arcadia Éditions)



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Site du Festival OFF :
www.avignonleoff.com


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