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Mademoiselle Frankenstein


de
Thierry Debroux




 À La Folie Théâtre, en ce début novembre, il y a un parfum d’Halloween dans l’air pour cette troisième saison de Mademoiselle Frankenstein de Thierry Debroux. On est dans une petite salle. Comédiens et public tout proches, presque entremêlés pour une communion gothique.

À l’image de ce climat d’ouverture, Lazzaro Spallanzani nous nargue de son œil perçant, depuis son laboratoire d’alchimiste. Il est obsédé par le roman de Mary Shelley dans lequel – en 1816, à l’âge de dix-neuf ans, par une nuit zébrée d’éclairs –, elle mit au monde le personnage d’un écumeur de cimetières : le docteur Frankenstein.
Pas n’importe où d’ailleurs ! En Suisse, dans la Villa Diodati du poète Byron, en compagnie de son futur mari le poète Shelley.

Bien des années plus tard, Lazzaro veut savoir le secret inventif de Mary : comment elle a fait pour engendrer fictivement un tel monstre. Alors, il la prend au piège dans son laboratoire. La drogue à son insu. L’attache sur un fauteuil de torture. Elle doit parler. Dire le secret de son état d’esprit d’antan.
Cahin-caha, malgré les résistances de Mary, un duo va prendre forme, orienté vers l’introspection de cette nuit créative. Le duo fait appel à l’hypnose. Mary explore les couloirs d’un labyrinthe démoniaque. Son esprit se distord, va de surprise en surprise à travers les « off » de pleurs d’enfants et l’écho de carillons étranges.

Lazzaro Spallanzani est très identifié au docteur Frankenstein. Comme il le signale à Mary, « pour fabriquer un monstre, ce n’est pas si compliqué, il suffit de prendre un enfant au berceau et de l’élever sans amour dans un laboratoire d’alchimiste. »
Un puzzle explicatif se forme. On passe par les mathématiques, le nombre 11, presque un nombre d’or, relatif à une mère morte en couches, un bébé mort mystérieusement, et bien d’autres surprises.
Au fil de la pièce, on finit par découvrir qui sont réellement Lazzaro et Mary. De même se révèle le monde de ces désaxés sociaux de Shelley et  Byron, poètes géniaux, déprimés et caustiques. Shelley n’a-t-il pas embrassé  pour la première fois sa future femme Mary, une nuit, au cimetière, devant la tombe de la mère de celle-ci.

Thierry Debroux, directeur du Théâtre Royal à Bruxelles, a réussi l’écriture d’une belle dramaturgie, nimbée de suspense, qui n’est pas sans rappeler Harlan Coben dans son dénouement. Une mise en scène tout à fait subtile sous une lumière jaunie, parcellée d’ombres inquiétantes et de fioles fumantes.

Mademoiselle Frankenstein, c’est le tableau d’un univers en circuit clos et la pièce n’a pas volé ses « 2 P’tits Molières. » Et comme le dit Frédéric Gray (metteur en scène virtuose de ce climat intrigant), venu saluer le public en fin de spectacle : « Toute cette histoire est vraie. » Alors, à chaque esprit bien rangé d’explorer son habitacle intérieur, afin de voir si, à tout hasard, un inconnu peu recommandable ne s’y cacherait.
En tout cas, un spectacle passionnant, bien rythmé dans le succès.

Patrick Ottaviani 
(07/11/15)    



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Une loge
pour le strapontin














À La Folie Théâtre

6, rue de la Folie-Méricourt
75011 Paris

Réservations :
01 43 55 14 80





Mise en scène
Frédéric Gray
et
Géraldine Clément

Avec
 Frédéric Gray
 et
Christelle Maldague

Bande son
Hugo Magagnin
et
Matthieu Dessemme

Décor
NoArt