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Chat en poche


de
Georges FEYDEAU



Quelle envie de se faire un nom que celle du jeune Feydeau – il n’a que vingt-six ans – lorsqu’il fait représenter le 19 septembre 1888 au théâtre Déjazet Chat en poche.
La pièce est mal reçue, elle fait un bide ; 36 représentations.
La critique de l’époque tient à signaler à ce jeune homme, vaudevilliste en herbe, qu’en matière de saugrenu et de "loufoque", il y a des limites à ne pas dépasser.
Qu’à cela ne tienne, Chat en poche est aujourd’hui une œuvre importante du Vaudeville, qu’Anne-Marie Lazarini met en scène avec talent au théâtre Artistic Athévains.

Dès l’entrée sur scène, on se régale. Pacarel, Landerneau, Amandine, Marthe et Julie,  excités comme des puces, debout ou à croupetons, sont à la recherche d’un chat hypothétique, avant de se mettre à table autour d’un canard à la "Rouennaise". Pacarel, le maître de maison, imbibé de sa réussite sociale, déclame à ses invités : « Je me suis enrichi dans la fabrication du sucre par l’exploitation des diabétiques. »
Ne manque plus que l’ascension culturelle !
À ce sujet, il est loin d’être à court d’idées. Sa grande fille Julie ne vient-elle pas d’écrire un opéra ! Le ridicule ne tue pas comme on dit, alors il a convoqué pour l’interpréter un ténor en vogue, un certain Dujeton ! Sur ces entrefaites, se présente le fils Dufausset, recommandé par son père à son vieil ami Pacarel. Celui-ci le suppose, quiproquo d’ouverture oblige, être le ténor.

Dès lors, s’enchaînent embrouillaminis et confusions. A l’exemple des insatisfaites Amandine et Marthe jetant leur dévolu sur ce grand dadais de Duchausset qui, appâté par la bagatelle, mord aux hameçons.

Les situations ironiques fusent et l’on se dit qu’il a dû jubiler le jeune Feydeau en croquant, à la manière de nos contemporains Guignols de l’info, ses personnages irradiés de bêtise, de cynisme et de médiocrité, brocardant par là même une société fin XIXe siècle ivre de gloriole.

On est déjà, avec un peu d’avance, dans le théâtre de l’absurde cher à Brecht et autre Ionesco.

Anne-Marie Lazarini a réalisé en 2013, en ce même Artistic Athévains, Ravel de Jean Echenoz, pièce récompensée à cette occasion par le prix « Laurent Terzieff » du meilleur spectacle en théâtre privé.
Sa mise en scène de Chat en poche est excellente. Les banderilles de quiproquos sont réglées juste comme il faut, décochées au moment où il faut, par des comédiens, investis dans un tourbillon cocasse, dont il faut souligner la performance.

Il n’est pas étonnant non plus, que la scénographie de François Cabanat soit insolite et biscornue : plancher pentu, murs trapézoïdaux, chaises acidulés rouge, jaune ou verte, dans le style « Alice au pays des merveilles », tout cela corroborant le déséquilibre hystérique d’une famille bourgeoise de  la belle époque.

Au royaume du Vaudeville, Feydeau est toujours le roi. Et si sa logique de l’absurde était, pour les spectateurs de 1888 empreinte d’une tonalité avant-gardiste, Chat en poche, caustique et drôle, aujourd’hui nous enchante.

Patrick Ottaviani 
(04/12/14)    



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Une loge
pour le strapontin










Artistic Athévains

45 bis rue Richard-Lenoir
75011 Paris

Métro : Voltaire

Réservation
01 43 56 38 32





Mise en scène
Anne-Marie Lazarini

Avec
Jacques Bondoux
Cédric Colas
David Fernandez
Giulia Deline
Frédérique Lazarini
Sylvie Pascaud
Dimitri Radochévitch

Assistant à
la mise en scène
Bruno Andrieux

Décor et lumières
François Cabanat

Costumes
Dominique Bourde