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Je m'occupe de vous personnellement


de et par
Yves-Noël Genod



Au théâtre du Rond-Point, enfin un spectacle avec animaux… Pas d'inquiétude, juste deux poules qui jouent d'une manière étonnante leur rôle. Elles savent entrer côté Jardin et sortir côté Cour. Aucun risque donc pour les allergiques aux poils et plumes, nos deux volailles ne font qu'une brève apparition.

Nous sommes dans un spectacle où le temps prend largement le temps de passer… où l'espace peut être inoccupé ; mais à nos chronomètres malgré tout, cela dure deux bonnes heures (Peut-être trop ?… Peut-être pas suffisamment ?) et l'espace s'élargit dans certains silences de la salle.

Je m'occupe de vous personnellement d'Yves-Noël Genod nous provoque dans notre impatience, nous contrarie dans notre désir de spectacle, nous énerve dans notre avide besoin de scène… mais quelque chose se passe… donc nous restons bien enfoncés dans nos sièges.

Nous assistons à ce spectacle dans la salle Roland Topor du Théâtre du Rond-Point dont trois des fenêtres donnent sur l'avenue Franklin D. Roosevelt ; des fenêtres que les personnages utilisent dans leur jeu… ou leur non-jeu… en les ouvrant le temps de fumer une cigarette ou pour héler un personnage imaginaire (ou pas !) en nous laissant le temps de contempler ce simple spectacle comme si nous étions devant un Ultra Reality-Show sur un écran de télévision… Valérie Dréville, Marlène Saldana, Alexandre Styker et Dominique Uber évoluent sur scène avec une sobriété voulue, cela crée un ballet qui laisse une large place à notre imaginaire, même si parfois celui-ci s'éteint faute de matière.

Un des personnages, Marcus Vigneron-Coudray, nous offre une chorégraphie étonnante mais qui ne détonne pas avec le spectacle, il évolue avec des pas de fauve acrobatiques ou plonge dans une piscine improvisée sur la scène… On le voit nager sur un sol plat avec la souplesse d'un crawleur majestueux dans un grand lac norvégien profond. Cela dure un peu trop, alors que les autres personnages autour de lui allument de nouvelles cigarettes, ouvrent de nouvelles fenêtres ou arrosent abondamment les plantes vertes qui servent d'unique décor.
Le silence est ici comme dans une partition de musique : il a sa place ! On entend toutefois derrière des portes quelques paroles, quelques couplets de chansons qui nous parviennent comme ceux d'une fête dont nous serions exclus.

La magie de cette pièce subsiste par le fait que nous pourrions, nous autres spectateurs nous diriger sur scène pour jouer un rôle de passage (le nôtre), nous serions nous, ici et maintenant, même si cela devait paraître décevant.

Lorsque l'on demande à Yves-Noël Genod : Que verra-t-on, quand on verra Je m'occupe de vous personnellement ? Il répond : Eh, bien, ce que vous voulez. Le client est roi. Et la maison cherche à le satisfaire. On fera une étude de marché, on étudiera le contexte, les manques, les créneaux et on essayera de donner au public ce qui le satisfera. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? Tout le monde fait ça.

L'argumentaire du spectacle nous rappelle qu'Yves-Noël Genod "a fréquenté l'école de Vitez à Chaillot, les maîtres Claude Régy ou François Tanguy, s'est défait des influences trop lourdes pour casser la baraque de l'establishment culturel. Les titres de ses projets, plus de trente spectacles en moins de dix ans, en solo ou en bande, en disent long sur son sens des conventions : En attendant Genod ; Pour en finir avec Claude Régy ; Jésus revient en Bretagne ; C'est pas pour les cochons ! ou encore Rien n'est beau. Rien n'est gai. Rien n'est propre. Rien n'est riche. Rien n'est clair. Rien n'est agréable. Rien ne sent bon. Rien n'est joli. Sur la scène, laboratoire d'expériences loufdingues, il déraille, se perd ou feint de s'égarer. La parole est libre, lâchée. Tout fait semblant d'être improvisé. Jean et tee-shirt, il commente, digresse, il peut évoquer Sarraute, Duras, ou ses soirées en boîte de nuit."

La qualité de ce spectacle devient poignante lorsque l'on ne devine pas son achèvement (peut-être par manque de fermeture de rideau), elle survient dans un instant qui ressemble à sa trame et il faut un complice d'Yves-Noël dans la salle pour que les applaudissements s'expriment. Plus tard dans nos voyages métropolitains pour rejoindre nos demeures quelque chose s'éveille en nous : une interrogation ! Et si le théâtre devenait une fête permanente et sans règle ? Mais avec des si on dévoilerait Godot sur scène.

David Nahmias 
(09/06/12)    



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Une loge
pour le strapontin















Théâtre
du Rond-Point


2 bis, avenue
Franklin D. Roosevelt
75008 Paris

Location :
01 44 95 98 21




Avec :

Valérie Dréville

Marlène Saldana

Alexandre Styker

Dominique Uber