Retour à l'accueil du site | ||||||||
Le titre définit la construction du livre en 129 textes courts qui nous racontent le quotidien d’une petite fille à la fin des années 70, très fière de parents exceptionnels et flamboyants auprès desquels la vie n’est pourtant pas toujours facile. C’est le ton sur lequel sont racontés tous les événements, anecdotes et réflexions de Nelly qui fait la qualité de ce beau et court roman. Un ton tout en nuances, mêlant la naïveté à la lucidité, l’admiration à la crainte, la fierté à la honte, la soumission à la colère. Elle les aime, les admire mais ce n’est pas toujours simple. L’enfance de Nelly est bien située dans une époque pleine de contradictions, avec sa violence (Suicide collectif de 914 adeptes du Temple du Peuple, assassinat d’Aldo Moro) et ses nouveautés comme le premier Mc Donald’s où elle est invitée à un anniversaire. Ses parents trouvent cela de mauvais goût mais quand le père devient consultant en agroalimentaire et qu’on leur livre toutes sortes de produits nouveaux souvent américains, par cartons entiers et même par palettes, « ils n’opposent plus aucun argument franchouillard à ce consumérisme importé des États-Unis, il apporte trop d’argent au ménage. Sa mère ne fait plus à manger, quand ils ont faim ils ouvrent le frigo et ils grignotent debout. Tout ce qui est frais tombe dans l’oubli. » Le père est brillant, séduisant et séducteur, souvent absent et en goguette, capable aussi d’une grande violence, d’un caractère très entier, ne supportant ni contradiction ni humiliation, capable de ne pas adresser la parole à sa femme et à sa fille pendant plusieurs jours. L’ambiance à la maison est souvent tendue. La mère de Nelly est mannequin. « Ça veut dire qu'elle travaille pas trop. Parfois elle doit partir pour des défilés de mode, dans la grande ville, ça peut durer une semaine, voire deux. » Elle est très belle avec « de faux airs de Catherine Deneuve mâtinée d'une larme de Marilyn et d'un soupçon de Dalida ». Elle est totalement soumise à la violence et aux caprices de son mari mais peut se montrer dangereuse pour sa fille. « Quand celle-ci lui déplaît, ses yeux verts prennent une lueur presque jaune, et du venin sort de sa bouche. Le signe astrologique chinois de la mère est le serpent. » Nelly a des amies, Karine, Anikki, Mireille, et aussi un ennemi, le fils Berbec, toujours prêt à se moquer d’elle et l’humilier. Au fil des pages, la petite Nelly devient adolescente, les expériences se multiplient. Katja Hunsinger, actrice et autrice de théâtre, sait mettre en scène les situations et trouver les mots pour exprimer et partager les sensations, les sentiments, les colères et les désirs d’une fillette qui peu à peu devient une jeune fille dans un contexte familial complexe et contrasté, plein de joie et de peur, de fierté et de honte. Un très beau premier roman, parfois cruel, souvent émouvant. Serge Cabrol (15/07/22) |
Sommaire Lectures La ronde de nuit 132 pages - 10 €
Vous pouvez voir Katja Hunsinger sur scène au Festival d’Avignon 2022 dans une adaptation du texte de Joseph Ponthus, À la ligne. Liens vers le site du théâtre et le site de la compagnie. |
||||||