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Louis-Philippe DALEMBERT

Milwaukee blues



En mai 2020 mourait George Floyd, cet Américain noir qu’un policier a étouffé sous son genou lors d’une interpellation. La cause de cette interpellation musclée ? L’appel d’un épicier affirmant que le jeune homme – car George Floyd était encore jeune – l’avait payé avec un faux billet. La suite, tout le monde la connaît : le monde entier s’est soulevé contre cette injustice policière.

De cette affaire, Louis-Philippe Dalembert fait son roman. Un roman polyphonique qui donne la parole à tous ceux qui ont connu George Floyd devenu Emmet Till dans le roman. À ce changement de nom près, tout a l’air vrai et l’est peut-être. Peu importe au fond puisque la fiction l’emporte toujours sur le réel et qu’elle nous fait ici entrevoir le principal : George ou Emmet ne sont que des hommes, des humains, et aucun humain ne mérite une telle mort.

Le premier à qui Louis-Philippe Dalembert donne la parole est l’épicier. Aurait-il appelé la police s’il avait su ce qu’il allait déclencher ? Il faut lire Milwaukee blues pour le savoir. Suivent la mère d’Emmet, l’institutrice d’Emmet, son amoureuse de jeunesse, son ami d’enfance, puis son coatch, sa première femme et tant d’autres, toute une ronde d’êtres qui ont à dire sur lui et qui sont ici personnages bien que, toujours, on se sente aux frontières du réel.

Milwaukee blues est donc un roman réaliste, qui nous plonge, au-delà des personnages, dans une Amérique pauvre et sans avenir, l’Amérique des exclus, des chômeurs. Emmet en vient, voulait en sortir mais a dû y revenir et, pour son malheur, y est aujourd’hui enterré.

George sera-t-il oublié comme des milliers avant lui ? Si oui, Emmet prendra son relais. Emmet personnage de papier restera à jamais celui par qui on peut retrouver trace de chaque partie de sa vie voire de son cœur.

Un roman réaliste, oui, mais un roman mémoire ou hommage. Un roman noble.
On regrettera peut-être que le travail de polyphonie ne soit pas suffisamment poussé, chaque personnage ayant sensiblement la même voix que le précédent ou le suivant. Mais le contenu est là, toujours, pour nous happer. Et puis l’ombre de George aussi, elle qui plane dans ce roman, au-dessus des pages de Milwaukee blues dont on entend parfaitement la lourdeur tendre du blues. Un peu comme une ballade. La ballade de ceux qui sont morts trop jeunes.

Isabelle Rossignol 
(31/08/21)    



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Lectures







Louis-Philippe DALEMBERT, Milwaukee blues
Sabine Wespieser

(Août 2021)
288 pages – 21 €




Louis-Philippe Dalembert,
auteur haïtien né à Port-au-Prince, vit à Paris. Il a publié de nombreux ouvrages (romans, nouvelles, poésie…) et obtenu plusieurs prix littéraires.


Bio-bibliographie
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son précédent roman :
Mur Méditerranée