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Paul FOURNEL

Faire Guignol


Il est bien agréable de faire le guignol de temps en temps et là nous passons un excellent moment en compagnie de cette marionnette, désormais si célèbre.
Paul Fournel nous présente Laurent Mourguet, le créateur de Guignol. Nous suivons tout son parcours, sa détermination, le soutien de sa femme et de ses enfants, les rivalités avec d’autres marionnettistes, l’appui d’amis musiciens ou cabaretiers. C’est aussi une belle peinture de l’époque, nous traversons la fin du 18e siècle et le début du 19e avec ses périodes troubles, la Révolution et la Terreur, ses luttes, avec notamment la révolte des Canuts que Laurent Mourguet soutiendra, étant lui-même un ancien canut.

L’alternance entre une présentation de chaque chapitre, sous forme d’un dialogue avec le lecteur, et la vie romancée de Laurent Mourguet crée un ensemble passionnant et instructif.
Nous découvrons les premiers pas de Guignol et avons la possibilité de passer derrière le castelet pour voir comment Laurent Mourguet manipule ses marionnettes à gaine. D’autres techniques sont aussi détaillées comme les marionnettes à fils et à tiges.

La géographie de la ville de Lyon apparaît au fil du roman qui est un bel hommage au parler lyonnais qui s’intègre très bien et se comprend facilement par déduction.

Laurent Mourguet ne sait pas lire : « – C’est ça le "Théâtre Guignol Mourguet", ma chenuse Jeanne, rien de moins : tout le talent au bout des doigts et tout le reste dans la tête ! »
Heureusement, des textes existent et quelques extraits de spectacles et de chansons sont présentés ce qui nous permet d’être spectateurs après avoir vu l’envers du décor.

Laurent Mourguet a toujours été très déterminé et pourvu de nombreux talents : « Être marionnettiste demande d'avoir beaucoup de savoir-faire différents : il faut sculpter, peindre, coudre, bricoler, composer des histoires, jouer, inventer, former les hommes, une troupe, trouver des spectateurs et encore des spectateurs, les séduire, et mener toute cette entreprise comme un chef de magasin. »

C’est un roman très agréable à lire qui donne envie d’aller voir Guignol à Lyon et déguster aussi des plats typiques dans un Bouchon lyonnais car quelques recettes nous mettent l’eau à la bouche.

Paul Fournel nous explique à la fin du roman comment il s’est passionné pour Guignol : « Lorsque le moment arriva de choisir un sujet pour ma thèse, je décidai de m'intéresser de plus près à ces différences résiduelles entre la langue du Lyonnais et le français d'Île-de-France. Naturellement, parce que je savais qu'il était un conservatoire de ces différences, je retins Guignol comme image. Bavard, joueur, attaché à sa ville et à sa langue, célèbre, il était un porte-drapeau idéal, à la fois nom propre et nom commun. »

« "Qu'est-ce qu'on écrit quand on ne sait pas écrire ?", c'était le chemin de Guignol, et "Qu'est-ce qu'on écrit quand on peut tout écrire ?", c'était le chemin de l'Oulipo que Raymond Queneau et François Le Lionnais m'avaient demandé de rejoindre quelques mois auparavant.
Qu'écrit-on quand on est comme Laurent Mourguet incapable d'écrire mais pas inculte pour autant ?
Qu'écrit-on lorsqu'on est Raymond Queneau, Italo Calvino, Georges Perec, Jacques Roubaud et tant d'autres, quand on est capable de tout inventer ? »

C’est donc une analyse passionnante qui nourrit toutes les interrogations liées à la création artistique.

Brigitte Aubonnet 
(13/02/19)    



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Éditions P.O.L.

(Février 2019)
272 pages - 19,50 €




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