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François BOTT


Un hiver au Vésinet


Les nouvelles ici sont courtes et variées. On y rencontre :
La demoiselle de Bois-Colombes, postière de son état, qui s’écrit et s’adresse à elle-même des lettres teintées de bovarysme ;
Un directeur d’agence bancaire retraité, veuf et amoureux de la grammaire, confronté à une jeune journaliste pétulante et radieuse qui apprendra au misanthrope à « devenir diplomate avec soi-même » ;
René Duval, jeune professeur de français remplaçant, passionné inconditionnel de « l’homme aux semelles de vent », domptant et séduisant sa turbulente classe de collège technique en conciliant la poésie rimbaldienne et la pratique du poker dans laquelle il excelle pareillement ;
Une mère submergée par les préparatifs du mariage de sa fille puis des noces de celle-ci en présence d’un oncle étrange tout droit sorti d’un roman de John le Carré ;
Une bibliothécaire venue lire tous les jours à sa pause dans le même parc public prise sous son aile par un vieux philosophe, un fonctionnaire effacé qui s’est trompé de siècle et cherche dans les livres « des leçons de savoir mourir » ; un chauffeur de taxi parisien passionné de football et de Stendhal dont le véhicule devient corbillard ;  un nourrisson qui se raconte de sa naissance à son premier anniversaire ; une veuve niant la mort de son mari qui chaque jour guette son retour ; et... quelques autres récits tout aussi savoureux.
Tous évoquent une banlieue tranquille qui défie la mélancolie francilienne et redonne des couleurs à l’hiver. 

Les personnages simples, fragiles et émouvants se retrouvent au cœur d’histoires qui seraient aussi banales que dérisoires si l’auteur ne les peignait pas avec cette touche d’humour et ce zest d’humanité qui font toute la différence. Ces portraits, toujours à distance du moindre jugement, sont des variations subtiles sur les sentiments semblables à des aquarelles délicates et élégantes.
 « Pour mieux relater l’histoire intime des gens, approcher le secret et la vérité de leur existence, il faudrait faire l’histoire de leurs larmes, de leurs silences, de leurs sourires. » (L’histoire d’un sourire)  
« Toutes les vies sont romanesques mais elles ne le savent pas. »(Ne m’appelez plus Marguerite)
Le style classique jusqu’à y gagner un certain charme suranné ne dédaigne ni le recours aux formules toutes faites ni celui aux images quand elles y trouvent une place légitime.
« Le vieil homme avait rêvé, parfois, de mourir pour une virgule. » (Chut, mademoiselle)
« La déclaration d’amour n’était plus à la mode, comme du reste la déclaration de guerre. Seuls les impôts se déclarent encore, et les maladies. Mais celles-ci ne respectent pas nécessairement les conventions de Genève. » (La demande en mariage)
« La perspective de devoir mourir dans pas longtemps mettait Jacques Sénéchal de mauvaise humeur, mais il faut dire que la mauvaise humeur était l’état naturel de cet ancien professeur de lettres » (Le 7ème ciel).

Et dans cette fresque pointilliste un brin nostalgique et poétique qui évoque la fuite du temps, presque naturellement, la littérature, avec le philosophe Alain devenu personnage mais aussi les fantômes de Rimbaud, Flaubert, Stendhal ou Balzac qui s’infiltrent par l’intermédiaire de l’évocation de leurs œuvres, devient elle-même un ingrédient essentiel du récit.  
Un livre d’un autre temps, à l’écriture ciselée, grave et joyeux, empreint de légèreté et de tendresse, qui se déguste. 

Dominique Baillon-Lalande 
(02/06/18)    



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La Table Ronde

(Février 2018)
176 pages - 14 €









François Bott,
né en 1935, a déjà publié une trentaine d’ouvrages.



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