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Eugène GREEN

Les voix de la nuit



Eugène Green est connu comme cinéaste, un cinéaste qui aime manier l’art du baroque et a le souci de la langue dans toute sa précision. Logiquement, la littérature l’a tenté. Depuis 2001, il publie régulièrement des romans, offrant au public des textes toujours raffinés, dans lesquels on retrouve la patte du cinéaste, notamment dans ses dialogues, toujours brefs mais ourlés, concis.

Dans Les voix de la nuit, ces talents se conjuguent pour nous faire découvrir le Pays basque. Tout en tension, voire un peu sur le fil, deux personnages traversent ce pays afin d’y retrouver la trace d’un passé qui, trop pesant pour l’un des deux, l’empêche de prendre son envol.

Deux jeunes gens marqués par la mort et qui le seront, durant leur quête, par l’au-delà. La fille jadis aimée, le père étrangement disparu, les fantômes rodent au milieu des vivants, reviennent les hanter dans des scènes où se dévoile le rapport au sacré de l’auteur. S’y combine la nature, si proche de ce sacré où l’univers prend des formes spectrales.

Mais c’est avec le monde bien réel que les jeunes garçons auront également à faire. Il y aura vengeance à mains nues, comme pour prouver que la seule justice divine ne suffit pas à régler l’ordre des choses.

Combat entre soi et soi. Lutte pour désarmer le passé. Afin de libérer totalement ces deux êtres, ne manquait que l’amour. Calmement, il traverse les pages. Sans passion. Sans fadaise. Chez Eugène Green, l’amour semble une source aussi limpide qu’évidente. Lorsqu’il apparaît, ce n’est que pour durer. Sinon, il n’est pas. On est ici dans une logique relevant de l’amour courtois. Un repos dans le chaos des sens.

Le livre entier apporte ce repos, tranchant tellement avec nos conceptions actuelles. C’est là le vrai talent d’Eugène Green : être à part, singulièrement hors du temps, des courants, des modes. Sans doute parce que la langue française n’est pas sa langue maternelle, il lui voue un culte qui déplace et la langue et lui-même vers des sphères qui ont peut-être à voir avec le sujet même de ce livre : les voix de la nuit. Des voix que le jour ne peut entendre faute de savoir écouter.

Isabelle Rossignol 
(20/07/17)    



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Lectures








Robert Laffont

(Janvier 2017)
216 pages - 18 €





Eugène Green,
né en 1947 aux États-Unis, a fait de la France
sa patrie d'adoption.
Metteur en scène, cinéaste, essayiste et romancier, il a déjà publié une douzaine de livres.


Bio-bibliographie
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