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La diagonale du Condor
Cet ouvrage est bien sûr, et c’est ce qui saute aux yeux quand on le feuillette, un superbe album sur le Chili, avec des photos à presque toutes les pages et souvent même en double page. Mais au-delà de nous faire partager un voyage, il y a là un autre projet. On est habitué aux « making of » et autres bonus pour les films, beaucoup moins pour les romans. C’est pourtant en partie ce qui nous est offert ici : Caryl Férey nous fait découvrir le pays, les paysages et les gens qui ont contribué à l’écriture de son roman policier paru en 2016, Condor. Ce livre est le récit du voyage de 2014 où l’auteur, avec le photographe Romain Tanguy, surnommé Chorizo-Bouillant, et trois amis, deux musiciens et une comédienne, a sillonné le Chili, du désert d’Atacama au territoire des Mapuches en passant par Valparaiso et Santiago. « L'Atacama donnait du rêve, avec ses plateaux qui en faisaient l'un des déserts les plus hauts du monde, ses cailloux préhistoriques et son aridité extrême. J'avais des pistes – des mois de documentation, une histoire plus ou moins en place, des personnages en devenir qui, c'était de plus en plus sûr, finiraient leur course ici, au cœur de l'Atacama. » Des extraits du roman s’intercalent dans le texte et montrent comment la réalité observée pendant le voyage est venue étayer la fiction. Après le désert, c’est la descente vers le Pacifique, un océan violent, « une brute épaisse », « sauvage, télescopé de courants et de vagues inégales ». C’est là que dans le roman, Esteban et Gabriela feront l’amour et comprendront que « l’océan qu’ils contemplent est dur et beau, à leur image. […] Il fallait ça pour lier mes héros, un Chilien plein aux as et une vidéaste mapuche fauchée dix fois plus forte que lui. Quoi saisir de leur nature sinon dans la Nature qui les constituait ? L'océan renfermait Kaï Kaï, dieu de la Mer, l'ennemi mortel des dieux mapuches, qui lui opposaient la puissance des volcans. Mes deux amants seraient liés au-delà de l'amour... » Ensuite c’est Valparaiso – et la maison de Pablo Neruda dont un rapport récent a confirmé qu’il n’est pas mort du cancer qui était en voie de rémission mais d’un empoisonnement – et Santiago où se déroule une manifestation qui se retrouvera dans le roman. Dans la banlieue sud de Santiago, c’est la découverte du quartier de La Victoria qui « avait vu le jour durant l'hiver 1957, quand des milliers de déshérités avaient investi un terrain vague pour y bâtir des cabanes. La police avait tenté de les déloger mais ces gens n'avaient rien, ni d'autres endroits où aller. On pouvait les tuer, ils ne bougeraient pas. Ils n'avaient pas bougé, s'étaient raccordés aux réseaux électriques, survivant coûte que coûte. » Plusieurs personnages du roman habitent ce quartier et de nombreuses scènes s’y déroulent. La fin du voyage nous emmène chez les Mapuches et nous présente à la fois leur territoire et leur histoire mais aussi, au fil de rencontres rendues possibles par la présence de Longue-Figure, la vie actuelle et les croyances de la communauté. Photos et textes s’entremêlent et se complètent pour constituer un ouvrage passionnant, tant pour la découverte du pays et de ses habitants que pour suivre au plus près la gestation du roman et la façon dont la réalité a nourri la fiction. Au-delà d’un très beau récit de voyage, c’est une expérience littéraire fascinante qui nous est proposée ici. Une magnifique idée de cadeau en accompagnant évidemment cet ouvrage du roman qui lui est étroitement lié. Serge Cabrol (24/10/17) |
Sommaire Lectures Gallimard (Octobre 2016) 272 pages - 35 € Photographies de Romain TANGUY
Bio-bibliographie sur le site de l'auteur : www.carylferey.com Découvrir sur notre site d'autres livres du même auteur : L'âge de pierre Zulu Fond de cale Condor Jeunesse : La dernière danse des Maoris L'Afrikaner de Gordon's Bay |
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