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Ne pas connaître son père est une épreuve pour bien des enfants mais apprendre, à trente ans, qu’on est le fils d’un prêtre pose à nouveau bien des questions. Paul est né en 1941, déclaré de père et de mère inconnus. Mais sa mère s’attache à lui et ne se résout pas à l’abandonner malgré les pressions qu’elle subit. Son père par contre, reste longtemps un mystère… Le roman (dont la quatrième de couverture précise qu’il est basé sur un récit autobiographique) s’ouvre sur une lettre que le narrateur écrit à son père en 1992. « J'ai sous les yeux une photo de vous en uniforme de capitaine. […] Il se dégage de ce cliché une impression de force et de sérénité, votre posture sans doute et plus encore l'expression de votre visage. J'ai fait glisser un cache, ne laissant à découvert que la partie du front au menton ; je me suis reconnu dans ce miroir. » En alternance avec cette lettre, des chapitres portant des prénoms (Dorine, la mère, et Ludovic, le père) vont reconstituer leur histoire depuis leur rencontre en 1940. C’est au lendemain de la Première Guerre mondiale que Ludovic est devenu prêtre en Bretagne. La Seconde Guerre lui fait reprendre l’uniforme et son grade de capitaine. Capturé dans les Ardennes, il s’échappe du train qui l’emmène en Allemagne et rejoint la Bretagne pour poursuivre le combat dans la clandestinité. La roman raconte ensuite la passion qui s’empare d’eux ; l’honnêteté de Ludovic qui ne cache pas sa prêtrise ; l’atmosphère lourde de cette période d’occupation allemande ; clandestinité des activités de Résistance et clandestinité de leur liaison ; la grossesse et la naissance de Paul ; le retour du mari démobilisé et très en colère ; les pressions de l’église pour éviter les vagues : pas de divorce, réconciliation des époux, éloignement du prêtre dans une abbaye, abandon de l’enfant confié à une famille de l’arrière-pays… « Tout le monde s'y était mis : le recteur de Plouergan, l'oncle de Ludovic, son frère et sa sœur, religieuse et non moins forte femme, le conseiller de l'évêque, tout un monde de gens en noir qui assiégeaient sa maison, l'envahissaient de courriers pathétiques ou comminatoires. Ils conjuraient, suppliaient que l'on évitât l'irréparable, réconciliez-vous avec votre mari, imploraient-ils, tout cela n'était qu'une mauvaise passe... » Dans cette quête d’identité, Paul découvre la façon dont Ludovic a été évincé par les autorités religieuses, déplacé, surveillé, détruit. Mais il découvre aussi combien sa mère est restée solide face aux pressions. Hommage à un père passionné, déclaration d’amour à une mère libre et aimante, ce livre ne cache pourtant pas les dégâts subis pas l’enfant né de cette liaison hors des règles strictes d’une société encore très marquée par la religion. Pas d’avortement, pas de divorce, pas de scandale… Un passionnant roman d’amour et de résilience. « Vous étiez mon père et j’aurais sans doute préféré une histoire différente. Mais qu’aurais-je fait à votre place ? » Serge Cabrol (10/07/17) |
Sommaire Lectures Grasset (Avril 2017) 240 pages - 19 €
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