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À la fin du 21ème siècle au cœur de Vesterbro, le quartier « rouge » de Copenhague, le Café Krilo était reconnu comme l'un des derniers lieux libertaires du Danemark. Sur les ruines de ce quartier détruit lors de l'instauration du régime autoritaire sur le pays, dans l’ombre de l’église et de son pasteur qui jouera un rôle non négligeable dans cette histoire, vivent John, Mark et Lotte. Ils ont récupéré le vieil immeuble qui abritait le café mythique abandonné dans l'espoir d'y faire revivre un jour la contestation syndicale et sociale. Une façon pour John, un universitaire issu de la classe moyenne en rupture avec sa famille et épris de liberté, Mark, fils d'un grand syndicaliste et lui même délégué syndical dans l’entrepôt où il travaille, et Lotte, fille de garagiste, étudiante engagée dans la lutte pour le droit des femmes et des homosexuels doublée d'une mécanicienne, de donner du sens à leur vie face à une société rétrograde où règnent la violence, la peur et le renoncement, portée par une dictature complice du joug des extrémistes religieux luthériens. Parmi les personnages qui entourent le trio, on trouvera tout un lot de traîtres, d'espions, de héros, et même un réseau international à travers la figure d’Odin, ce jeune d'origine tunisienne ayant étudié à Copenhague, qui organise la lutte créant « l'union de la résistance danoise » depuis l'étranger. Alliés ou ennemis, ceux-ci se relayent pour provoquer de nombreux rebondissements à leur aventure mouvementée. Dans cette projection dans un futur glaçant et terrible, l'auteur pointe sans les juger les dérives de nos sociétés modernes et les travers qui pourraient conduire l'Europe à une situation semblable. Et ce scénario extrême, accablant et surréaliste, donne à réfléchir. « Si notre plus grande menace n’étaient pas les attentats terroristes, ni les réfugiés de guerre, mais notre réaction à ces phénomènes ? Manque d’audace, de rêve commun, de liberté d’esprit… » écrit l'éditeur en quatrième de couverture. Si un jour la situation se retournait et que ces riches pays en paix qui refoulent les réfugiés que la guerre et la misère conduisent à leurs frontières, gangrenés à leur tour par la violence et la faim voyaient un jour leur population contrainte à chercher la sécurité et la survie ailleurs ? Mais ce livre n'est pas une plaidoirie et ne se veut pas totalement cauchemardesque. Cette fable nordique à la fois sombre et pleine d'humour sur les dérives droitières et policières de nos sociétés est portée par un rythme vif et habitée par de beaux personnages très incarnés. Un livre captivant comme un polar, salutaire, à mettre entre toutes les mains. Dominique Baillon-Lalande |
Sommaire Lectures Lemieux (Février 2017) 168 pages - 16 €
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