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Cette affirmation, c'est Salvador Fuensanta, homme d'entretien de l'aéroport qui l’assène à un voyageur en partance pour Tokyo, assortie d'une rocambolesque histoire comme celles qu'il a en stock pour tous les voyageurs, choisies avec discernement selon les destinations. En effet, l'employé atypique a coutume pendant son service d'interpeller les passagers en attente d'embarquement. Il ne se prive pas de leur poser d'étonnantes questions pour rebondir ensuite, au gré de leur destination, sur de bien étranges histoires. Comme un familier des lieux, il leur vante le chant du muezzin à Istanbul, le spectacle des soirées à Helsinki, la brume sur le lac de Côme, la maison de Dracula en Roumanie ou encore l'animation du centre-ville de Bangkok ou les mets en garde contre l'exotisme de pacotille qui leur est vendu. Quand nul n'attire son regard dans la salle d'attente, « un endroit où personne ne se dissimule parce que personne ne se connaît », ce narrateur impénitent exerce ses talents pour la serveuse de la cafétéria où il prend son café tous les jours ou la tenancière du relais de presse dont il est platoniquement amoureux. Comme un conteur, il pioche chez tous, voyageurs et collègues, pour constituer son répertoire, nourrir ses délires humoristiques et pleins d'esprit et transformer son matériau en voyages imaginaires qui ne sont pas toujours si éloignés de la réalité.
Dans ce premier roman – dont chaque chapitre dédié à une histoire s'apparenterait à une nouvelle si l'originale personnalité et le ton du narrateur unique et une logique de renvois et d’allusions ne les liaient entre elles – l'auteur s'amuse avec malice à entremêler ses récits pour surprendre, interroger et mieux captiver son interlocuteur. À partir de personnages plus étonnants ou touchants les uns que les autres, de références touristiques mais aussi sociologiques et surtout littéraires (« Si on voyage en Afrique il faut lire Kapuscinski, en Australie Chatwin, en Afghanistan Anne Seierstad, pour citer quelques noms et où que l'on voyage, "Les villes invisibles" d'Italo Calvino, vous ne croyez pas ? C'est le livre fondamental du voyageur. »), c'est un jeu permanent sur les identités (sous la tutelle de Pessoa), sur les mythes, la réalité et les impostures, qui nous est ici offert. On ne s'ennuie pas une seule minute dans ce roman débridé et jubilatoire qui a reçu le prix « Las Dos Orillas » consistant en la publication simultanée du livre en Italie, Grèce, Espagne, Portugal et France. Et si vous avez envie de savoir pourquoi « le japon n'existe pas », laissez-vous embarquer… Vous ne le regretterez pas. Dominique Baillon-Lalande (14/12/15) |
Sommaire Lectures Editions Métailié (Juin 2012) Collection Suites 160 pages - 9 € Traduit de l'espagnol par François GAUDRY
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