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Cloé MEHDI


Rien ne se perd



Mattia, onze ans, le narrateur de ce roman plus noir que polar, avait déjà une vie compliquée entre son tuteur, Zé, vingt-quatre ans, veilleur de nuit, et Gabrielle, la compagne de Zé, très dépressive, avançant sur un fil entre la vie et la mort, choisissant parfois la mort comme avec cette nouvelle tentative de suicide dont témoignent ses poignets bandés. Mais la vie de Mattia va encore se compliquer avec l’apparition sur les murs du quartier d’un tag représentant le visage d’un adolescent souligné de ces mots : « Justice pour Saïd ». Qui peut bien faire resurgir cette histoire datant de quinze ans, quand un adolescent a été tué par la police au cours d’un contrôle d’identité ?

Quelques jours après l’apparition du tag, Mattia, à la sortie de l’école, attend que Zé vienne le chercher en voiture. Le temps passe mais Zé a dû oublier. Mattia s’aperçoit que deux hommes plantés sur le trottoir en face lui jettent des regards en coin. « J’ai pas peur. Les pédophiles vont rarement par paire et les kidnappeurs ne s’en prennent qu’aux gosses de riches. » Un des hommes finit par traverser la rue et lui dit être un ami de Zé et vouloir reprendre contact avec lui. Il semble au courant de beaucoup de choses mais ce n’est pas rassurant pour Mattia qui refuse de donner l’adresse de Zé. Flics ou voyous, il n’en sait rien, mais n’a pas envie de les aider à retrouver Zé. Il part à pied sans que les hommes cherchent à le suivre.

Sur les pas de Mattia, on va voir peu à peu apparaître et s’emboîter les diverses pièces du puzzle qui représente ce qui s’est réellement passé quinze ans plus tôt, quand Saïd a été tué, et qui met en scène de nombreux personnages qu’on va découvrir au fil des pages.

Pourquoi le père de Mattia, éducateur spécialisé, a-t-il été interné après la mort de Saïd et pourquoi s’est-il suicidé à l’hôpital psychiatrique ? Où est la mère de Mattia qui semble avoir quitté son appartement sans laisser d’adresse et pourquoi a-t-elle donné son accord pour que Mattia soit confié légalement à Zé ?
Et comment Zé a-t-il obtenu la garde de Mattia alors qu’il est lui-même accusé d’avoir tué une jeune fille quand il était adolescent ? Quel lien Gabrielle a-t-elle avec toute cette histoire et pourquoi son frère réapparaît-il maintenant, si longtemps après ?

Gina la sœur de Mattia, fait aussi son retour dans le quartier au même moment. « Elle a passé les derniers mois à suivre le littoral le long de la Méditerranée, de Marseille à Izmir, presque toujours à pied. Sans téléphone et sans la moindre nouvelle à donner. » Et la voilà qui sonne à la porte avec son sac à dos…

Et qui sont les deux hommes qui attendent encore Mattia à la sortie de l’école quelques jours plus tard, qui prennent en chasse la voiture de Zé et dont Zé ne veut rien dire à Mattia ?

Cloé Mehdi réussit un roman très riche en émotions et en tendresse, en mystères et en suspense, dans une atmosphère à la fois très noire (folie, suicide, abandon, cambriolages, intimidations…) et chargée d’une forte dose d’affection entre des personnages contrastés et imprévisibles, souvent bien abîmés par la vie. Les secrets du passé vont revenir à la surface, la vérité va se  révéler, permettant à Mattia de comprendre le monde et les gens qui l’entourent  et de pouvoir continuer à grandir. Le choix d’un narrateur de onze ans adoucit l’écriture d’une auteure qui a trouvé sa place dans le noir et nous réserve certainement encore de belles surprises. À suivre...

Serge Cabrol 
(17/11/16)    



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Noir & polar








Éditions Jigal
(Mai 2016)
270 pages - 18,50 €










Cloé Mehdi,

née en 1992, a reçu
le Prix de Beaune 2014
pour Monstres en cavale,
son premier roman.