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Selma, l’héroïne du roman, est passionnée d’équitation – c’est seulement quand elle vole sur le dos de son étalon que son corps ne lui pèse plus– mais elle est surtout douée d’empathie à l’égard des chevaux. Elle parvient par la douceur et la patience à dresser un étalon rebelle, volontiers méchant avec ceux qui le martyrisent. Faut-il voir là une métaphore de l’art de la paix qui semble si étranger à son pays ? L’autrice prête aussi à Selma le point de vue animaliste d’aujourd’hui qui refuse la violence que s’autorise l’homme envers les bêtes. On peut aussi imaginer que l’étalon fougueux et rebelle est à l’image du peuple algérien, indomptable. En dressant Sheïtane, Selma le sauve de l’équarrisseur. Selma s’entend mieux avec son oncle Hicham qu’avec ses parents. Hicham, le frère cadet de la famille, vient de finir ses études d’avocat. Il est adoré par sa mère, Mima qui le protège comme le petit dernier. Il écoute de la musique raï très populaire en Algérie. Mais Hicham est revenu différent de ses deux années de service militaire dans le brasier du désert. « Il a rencontré Dieu ». Nous sommes en 1988. Il sera enrôlé par le Front Islamique du Salut et arrêté une première fois, torturé par la DGSN,( la direction générale de la sûreté nationale). Pour obtenir sa libération, son frère s’adresse au ministre mais il doit accepter en échange de participer à un trafic de médicaments. On voit à quel point, répression et corruption pèsent lourd. En 1990, lorsque Ali Belhadj, leader du FIS sera arrêté, Hicham acceptera de le défendre. Ce qui lui vaudra d’être arrêté à nouveau. Mouloud Hamrouche, limogé depuis peu, avait « choisi la voie démocratique, la voie des libertés, la voie de la sagesse. » Brahim le père de Selma est médecin. À l’hôpital, il opère des jeunes garçons sur lesquels l’État a tiré avec des armes de guerre. Ce sont des milliers de manifestants qui protestent contre la nouvelle carte électorale destinée à modifier l’issue des élections et qui sont sauvagement réprimés. Le roman débute et se termine par une scène de brutalité extrême, dans le village de Sidi Youcef où les hommes, les femmes et les enfants sont tués à la hache, à la machette ou au sabre par des islamistes déguisés en soldat, des égorgeurs. L’autrice mêle de façon subtile cet épisode de l’histoire qui l’a touchée de près à la vie romanesque d’une famille. On y apprend beaucoup tout en se passionnant pour l’intrigue. Nadine Dutier (07/03/24) |
Sommaire Lectures Gallimard (Janvier 2024) 288 pages - 21,50 € Version numérique 15,99 € Amina Damerdji Bientôt les vivants est son deuxième roman. Retrouver sur notre site son précédent roman : Laissez-moi vous rejoindre |
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