Amélie NOTHOMB

Le fait du prince



Imaginez… Un homme sonne à votre porte, vous demande l’autorisation de téléphoner à un garage et, une fois le numéro composé, s’écroule à vos pieds, mort ! Que faites-vous ?

La première réaction serait d’appeler les secours et sans doute Baptiste Bordave l’aurait-il fait un autre jour mais voilà, justement, la veille au soir, un homme lui a expliqué qu’on a beaucoup de soucis lorsque la police trouve un cadavre chez un particulier d’où cette habitude d’appeler un taxi et de filer vers un hôpital où l’on déclarera selon la formule rituelle que « l’individu est mort pendant qu’on le conduisait à l’hôpital ».

Baptiste réfléchit et cette hésitation entraîne toute la suite…
La curiosité est un vilain défaut mais comment y résister ? Qui est donc cet homme qui a eu l’inélégance de venir mourir chez lui ? Sa carte d’identité indique qu’Olaf Sildur est suédois, né la même année que Baptiste. Un signe du destin ? Il a mille euros dans son portefeuille et un trousseau de clés dans une poche.
« Je voulus voir son véhicule. Je sortis en emportant ses clefs. Plusieurs automobiles étaient garées dans la rue, mais c'était la première fois que j'y remarquais une Jaguar. J'essayai les clefs dans la serrure : j'avais gagné. Assis à la place du chauffeur, j'ouvris le vide-poches : la carte grise indiquait qu'Olaf Sildur habitait Versailles. Rien d'autre n'attira mon attention. Je rentrai chez moi où le mort m'accueillit avec discrétion.
— Olaf. Que vais-je faire de toi ?
 »

Une idée en appelant une autre, ne serait-ce pas l’occasion de changer d’existence ?
« Et puis, avais-je le choix ? Mon centre de gravité avait déjà quitté Baptiste pour Olaf. Je ne me rappelais même pas ce que je faisais avant. »

Baptiste échange ses papiers avec Olaf, ferme la porte de son appartement et met le cap sur Versailles…

Amélie Nothomb s’y connaît pour accrocher son lecteur et nous voici pris dans ce jeu fascinant de l’usurpation d’identité.

Une mort plutôt surprenante dans les premières pages, ça tire forcément vers le polar, mais avec une bonne dose de mystère et quelques allusions au travail énigmatique des agents secrets, le livre bifurque vers l’espionnage. Olaf était-il de la famille de James Bond ? Sa mort chez Baptiste était-elle un piège, un coup monté ? Si on ajoute une jolie blonde et une cave emplie de champagne, on pourrait même aller vers le roman d’amour… Allez savoir…

On sourit, on frémit, de plaisir, d’angoisse, de bonheur, de peur… Comment tout cela va-t-il finir ?

Un roman gigogne où le lecteur vit une étrange aventure en se glissant dans la tête d’un homme qui se glisse dans la peau d’un autre.

Serge Cabrol 
(18/09/08)    



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Editions Albin Michel

170 pages - 15,90 €