Franck COTTET

Un hiver comme un autre



Tout d’abord j’aimerai vous dire combien l’esthétique plastique du livre est belle. Rien que la couverture attire le regard. Les œuvres d’Évelyne Winocq Debeire jouent merveilleusement dans l’architecture donnée au recueil. Après cet aperçu de l’objet-livre, pénétrons dans le corps de l’écriture de Franck Cottet. Un hiver comme un autre vient nous parler de l’être dans des moments très intimes tels le passage vers l’être social (dans un sens comme dans l’autre), de ces moments furtifs de l’intime dans le social, etc.

Nous commençons un matin : Encore / de la nuit plein la bouche / plein / les poumons / présence tangible / les yeux tout juste ouverts / et avec eux le silence / d’abord / comme hier / de la nuit à la nuit.
Nous essayons de nous préparer mentalement à … : Le ciel a changé / quand les yeux se sont posés dessus / il y a du rose orange qui est venu / une toute petite chose / l’air de rien / un grand courant d’air / dans la tête / et puis rien.
Après des moments d’hésitation à être ce que les personnes connaissent de nous, sortons : Tes mains désertes / tellement / après ton départ / que tu ne sais plus où les mettre.
Et les premiers mots échangés avec un voisin ou une personne connue rencontrée. Des mots si anodins, qui ne disent rien d’essentiel, mais qui sont dits juste pour que : nos vies se sont frôlées / un peu / sans conséquence vraiment.

Et nous enfilons notre costume social pour la journée. Une sortie pour le repas de midi, où nous pouvons reprendre un peu des rêves laissés pour le jour. Ainsi la journée se passe ; arrive le soir… Et voilà / elle est tombée la nuit / pas vue venir / pas eu le temps / Mais c’est pas possible ça ! / il n’est que six heures ! / on a le temps de rien ! / comme si maintenant / tous les gestes allaient être en trop.
Nous rentrons et : En rentrant / tu parles au vent parce que les mots ont / besoin de venir. Que tu les as gardés / toute la journée. Que tu ne peux plus longtemps les retenir parce que tu penses / si je les avais dits à un ou une devant moi / quels yeux ils auraient fait ? / alors que là dans le vent…

La pluie vient s’immiscer dans notre vie, frappant aux carreaux, nous entraînant à rêver au printemps, aux couleurs, aux parfums des naissances… Puis la compagne arrive trempée, mécontente de cela… Les lèvres brûlées par les mots des retrouvailles /…/ Ça donne de l’air. Ça aide à respirer ça aussi.
Après la reprise de vie commune, des échanges, des moments partagés, vient l’heure de se coucher : Dans le noir / presque / mes mots couturent / la page / toi tu dors déjà / à côté.

La poésie de Franck Cottet est vivante de ses rythmes liés à l’intime d’un être. Elle est pleine de pertinence à nous dire des petits évènements qui sont importants en nous. L’écriture est souvent courte, tels des traits qui traversent l’esprit, des pensées qui sont juste esquissées, donnant de la force aux mots par de petits formats de poèmes. Sa poésie dialogue merveilleusement avec les paysages matières d’Évelyne Winocq Debeire.

Gilbert Desmée 
(28/10/08)    



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Poésie









Editions Soc & Foc
80 pages - 12 €


Illustrations
d'Evelyne Winocq
DEBEIRE




(détail de la couverture)