Daniel ARSAND

Des chevaux noirs



Où sommes-nous ? Dans une saga, un récit, un délire. Voilà la force du roman de Daniel Arsand. Jo Harfang parle de ses ancêtres : « Comment amorcer le premier chant de mon épopée ? Je ne sais pas. Alors je deviens tigre en cage. Et j’ai la tentation de piétiner plumes et cahier. Par quoi commence-t-on le récit d’une vie ? C’est quoi, un commencement ? Et c’est fait de quoi, une vie, même celle d’un dieu ? »

Jo Harfang nous dit avoir tué une femme, sa tante ainsi que des hommes, ses amants. Est-ce le fruit de sa confusion, est-ce la réalité ? Nous suivons ce personnage violent, émouvant, amoureux des chevaux. Sait-il aimer les êtres humains ? N’est-il que désir violent ? Son approche du désir et du sentiment amoureux est très personnelle : « Dans le train pour Rambouillet (le centre équestre n'en était qu'à quatre kilomètres) je lorgnai aussitôt assis les passagers, les hommes uniquement. Je les désirais tous. Désirer n'importe qui, et ne plus avoir à réfléchir à ce qu'est vraiment un être humain. Juste des torses, des bouches, des cuisses. Tous inter-changeables. En les désirant tous, j'avais l'impression, et que c'était bizarre, ça oui, de n'avoir plus de corps, de m'égarer en moi-même, de sombrer. »

A-t-il trouvé sa place, son nom dans la tribu des Harfang : « Notre nom a un parfum d’exil. Bien sûr. Vous en avez connu beaucoup, vous des chouettes harfangs dans l’Europe méridionale ? Notre nom est fait de duvet, de serres et de neige. »

Des chevaux noirs est un voyage au galop dans le temps et l’espace comme dans les précédents romans de Daniel Arsand mais aussi un voyage au cœur des conflits familiaux et personnels ce qui donne une force toute particulière à ce texte.

Entre folie et réalité, où se situe la vérité ? Y en a-t-il une ? Jo Harfang est persuadé de sa toute-puissance : « Et je sortis. Et j'étais comme fou. Ce qui a appartenu aux morts ne peut appartenir aux vivants. Eliane s'était emparée de ce qui aurait dû parer Laure Harfang en sa tombe. Seuls les dieux ont le droit d'hériter des pierreries des défunts. J'étais un dieu, et je le ferais savoir à Eliane, et je l'obligerais à n'être qu'une ombre. Les tuer tous, décidai-je, ma tante, les palefreniers, le propriétaire du centre, Di Giorgione. Il y aurait des flammes et des cris. Je serais ce que je suis. » Une toute-puissance avec un destin d’humain qui rend la quête de Jo Harfang particulièrement touchante.

Brigitte Aubonnet 
(24/08/06)    



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Editions Stock, 2006
176 pages
15,50 €

(paru maintenant en
Livre de Poche)






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